Il y a six mois, l'Agence de sécurité du médicament (ANSM) donnait son feu vert à la recommandation temporaire d’utilisation (RTU) du myorelaxant baclofène dans la prise en charge de l’alcoolodépendance pour les patients en échec des traitements disponibles.
Mais avec 5 000 malades inscrits sur le portail Internet "www.rtubaclofene.org" de suivi des patients (pour près de 5 millions de Français qui ont des problèmes avec l'alcool), les chiffres ne décollent pas. Aujourd'hui, l'Agence dresse le premier bilan de ces données collectées.
Près d'1 prescripteur sur 2 est généraliste
Entre le 14 mars et le 16 septembre 2014, 3 570 patients ont été enregistrés par 679 médecins, principalement des médecins généralistes (45 %), des médecins addictologues (32 %) et des psychiatres (13 %). Les patients étaient majoritairement des hommes (70 %), âgés en moyenne de 48 ans. Parmi les patients en initiation de traitement (39 %), l'indication la plus fréquente était la réduction de la consommation d’alcool (65 % des patients). Un peu plus de la moitié (57 %) a effectué au moins une visite de suivi et parmi ces patients, 163 ont arrêté le traitement (8 %).
L'efficacité du traitement démontrée
Par ailleurs, l'ANSM rapporte aussi « des résultats d’efficacité du traitement. » Ceux-ci portent sur les 2 032 patients ayant effectué au moins une visite de suivi. Résultat, les données récoltées montrent une diminution moyenne de la consommation journalière d’alcool de 56 g/j chez les patients en initiation de traitement, et de 15 g/j chez ceux déjà traités avant le début de la RTU.
Mieux encore, parmi les patients en initiation de traitement, 12 % étaient abstinents à l’initiation du traitement et 32 % lors de la dernière visite renseignée dans le portail. Et parmi les patients qui avaient déjà un traitement en cours par baclofène, 46 % d’entre eux étaient abstinents à la dernière visite renseignée dans le portail.
De plus, le score indiquant le besoin irrépressible de consommer de l’alcool (craving) a lui aussi évolué favorablement. Cela chez 74 % des patients nouvellement traités par baclofène et chez 45 % des patients déjà traités.
1 % d'effets graves (peut-être) liés au baclofène
S'agissant de la la sécurité d’emploi, 14 % des patients ont rapporté au moins un effet indésirable. Et, pour 9 % de l’ensemble des patients, ces effets sont possiblement liés au baclofène. Au total, 1,7 % des patients ont eu un effet indésirable grave et, pour 1,1 % de l’ensemble des patients, ces effets étaient possiblement liés au baclofène.
Les plus fréquents étaient de nature neurologique (3,9 % des patients), notamment des convulsions (0,2 %), et psychiatrique (2,9 % des patients), des troubles anxieux (0,5 %), une dépression majeure (0,3 %) et des idées suicidaires (0,2 %).
L'Agence précise toutefois que « les effets indésirables rapportés sont conformes à ceux répertoriés dans le RCP des spécialités à base de baclofène et aux signaux identifiés dans le cadre du suivi national de pharmacovigilance de baclofène. »
Le nombre de patients enregistrés toujours insuffisant
Enfin, au 20 mars 2015, l'ANSM juge toujours le nombre de patients enregistrés non satisfaisant. Ils sont aujourd'hui un peu plus de 5 000 patients sur le portail de la RTU. « Cette proportion semble très faible au regard de l’estimation de l’ensemble des patients traités par le baclofène dans l’alcoolodépendance », conclut l'Agence. Il y a en effet plus de 90 000 généralistes dans l'Hexagone qui ont très certainement dans leur patientèle des alcoolo-dépendants.
Selon une source proche du dossier, les différents acteurs de ce portail espéraient environ 15 000 patients inscrits après 6 mois de lancement. L'autre objectif des 100 000 médecins et 300 000 patients sur le portail d'ici trois ans semble donc difficile à atteindre.
(1) Résumé des Caractéristiques du Produit