Face à la pénurie de greffons, un amendement au projet de loi de santé propose de se passer de l’avis des proches du défunt dans des circonstances précises. Adopté dans la nuit de jeudi à vendredi par la commission aux Affaires sociales de l’Assemblée nationale avec le soutien du gouvernement, le texte prévoit de rendre le prélèvement automatique si le défunt n’est pas inscrit au Registre national du refus. Le projet de loi de santé sera examiné à l'Assemblée nationale à partir du 31 mars jusqu'au 10 avril.
Renforcer le consentement présumé
Déposé par les Prs Jean-Louis Touraine et Michèle Delaunay, députés PS, cet amendement prévoit qu’à partir de 2018, « le prélèvement peut être pratiqué dès lors que la personne majeure n'a pas fait connaître, de son vivant, son refus d'un tel prélèvement ». Les médecins ne chercheraient donc plus à recueillir le consentement de la famille. Le texte précise que « les proches du défunt seront informés des prélèvements envisagés et de la finalité de ces prélèvements. »
Actuellement, si un prélèvement est envisagé, la loi exige que les équipes médicales vérifient « systématiquement et obligatoirement si le défunt est inscrit au registre des refus », explique l’Agence de biomédecine. Or, moins de 100 000 personnes sont inscrites sur ce registre. Un chiffre que ne reflète probablement pas la part de la population favorable au don mais qui traduit l'ignorance du public de l’existence de ce registre.
Ainsi, dans une grande majorité des cas, les médecins n’ont pas connaissance de la volonté du défunt. Ils doivent donc « obligatoirement interroger les proches pour vérifier que le défunt n’était pas opposé au don », ajoute l’Agence de biomédecine.
Un choix difficile pour les proches
Une décision difficile et douloureuse qui mène souvent à un refus alors que près de 80 % des Français se disent favorables au don d'organes. Au moins un prélèvement possible sur trois est refusé. Un taux qui a triplé entre 1990 et 2012 passant de 9,6 % à 33,7 %. Les députés soulignent également que « la manifestation de ce refus est d’ailleurs souvent en contradiction avec le texte de loi : en effet, ce n’est pas l’avis de la famille qui est requis par la loi, mais le témoignage le plus juste et le plus assuré de la volonté du défunt ».
Pourtant, « les médecins ne vont jamais à l’encontre de la décision prise par ses proches », souligne l’Agence de biomédecine. Pour les élus, la législation actuelle ne garantit pas que « la volonté du défunt soit respectée », notamment dans les familles « où plusieurs point de vue s’opposent ».
En 2013, près de 19 000 personnes étaient en attente d'une greffe. Une liste d'attente qui s'allonge année après année, entraînant la mort de centaines de personnes faute de greffe.