« On ne conteste pas pour le plaisir de contester ! On a obtenu des engagements, alors on lève le préavis. On préfère poursuivre la mobilisation dans la négociation – pour le moment, en tout cas ».
Changement de stratégie à l’Isni (Intersyndicat national des internes en médecine). Dans la nuit de lundi à mardi, Mélanie Marquet, sa présidente, a pris sa plume pour s’adresser à la ministre de la Santé et lui annoncer la levée du préavis de grève, qui courait depuis plusieurs semaines.
« Lobbying parlementaire »
C’est le Figaro qui a révélé l’information. Contactée par Pourquoidocteur, la jeune femme confirme avoir pris compte des gestes du gouvernement à l’égard des internes. Elle dénonce également « la récupération politique du mouvement, en pleine période électorale ». « Dans le contexte d’entre-deux tours, il nous a semblé que la grève n’était pas le moyen le plus pertinent de faire entendre nos revendications ».
En pleine période de « lobbying parlementaire », l’Isni a réussi à faire amender plusieurs articles particulièrement décriés par les internes. Ainsi, la création du statut de Praticien Hospitalier (PH) remplaçant devrait être assortie de garanties « afin d’éviter de précariser les débuts de carrière hospitalière », précise Mélanie Marquet. L’article 38, portant sur l’organisation des soins par les ARS, a lui aussi été réécrit « afin que les collectivités territoriales ne puissent pas à elles seules gérer la formation des internes en fonction des offres de stage ».
Rassurés sur le tiers payant
Un autre point de tension a été évacué, concernant le service public hospitalier (article 26 du projet de loi). Les internes craignaient une restructuration de l’offre, notamment dans le privé, « ce qui nous aurait pénalisés en termes de débouchés professionnels ». Au final, « l’offre ne sera pas restructurée », affirme Mélanie Marquet.
Enfin, l’Isni a pris note des amendements liés à la généralisation du tiers payant, et s’est montré favorable à la direction prise par les débats parlementaires, « même si nous regrettons son caractère obligatoire ». « Ce sera l’Assurance Maladie qui pilotera la généralisation, et non pas les mutuelles, comme nous le craignions ».
Pour calmer les esprits échauffés, Marisol Touraine a également sorti le carnet de chèques. Les assistants qui exercent en temps plein à l'hôpital se verront verser une prime mensuelle de 243 euros bruts (puis 487 euros en novembre 2017), afin de les aligner sur d'autres statuts. « Il s’agissait d’aligner la rémunération des assistants sur celle des chefs de clinique, puisqu’ils font le même travail », précise Mélanie Marquet.
Refus d’une « contestation systématique »
La réforme du troisième cycle des études de médecine a été reportée et sera débattue lors de la Conférence Nationale de Santé. « Ce ne doit pas être une conférence pour nous endormir. Si les promesses du gouvernement restent lettre morte, nous reprendrons la contestation ».
Quant à suggérer, comme le fait Le Figaro, que Marisol Touraine a réussi à fissurer le front commun des médecins… « En réalité, nous nous sommes mobilisés ensemble, mais nous ne portons pas tous les mêmes revendications, précise Mélanie Marquet. Nous n’exigeons pas le retrait pur et simple du projet de loi. Notre stratégie consiste à maintenir le dialogue pour faire entendre notre voix. Marisol Touraine a semblé nous écouter, nous voulons montrer que notre contestation n’est pas fondée sur le rejet systématique ».