Vivre longtemps, oui, mais à quel prix ? L’espérance de vie va bel et bien s’allonger… mais les inégalités vont se creuser, selon des chercheurs britanniques. Des écarts qui devraient même se dessiner à l’échelle d’une ville telle que Londres (Royaume-Uni). C’est en tout cas la conclusion d’une modélisation parue ce 30 avril dans le Lancet.
Fixer la retraite à 98 ans ?
D’ici 2030, l’espérance de vie d’un homme devrait atteindre 85,7 ans, celle d’une femme 87,6 ans d’après les calculs de l’équipe de l’Imperial College de Londres. Une projection bien supérieure à celles avancées jusque-là, mais qui s’appuie sur les évolutions récentes de la société. « On n’y est pas du tout préparé, estime Philippe Rollandin, auteur du livre Le monde cannibale (1). C’est propre à l’ensemble des pays développés. Dans 20-30 ans, l’ensemble de l’Occident, c’est-à-dire l’Europe et les Etats-Unis, sera une immense maison de retraite. Cela provoque des changements en termes de dynamisme d’une société, de travail, de création de richesses. » S’ajoutent à cela les dépenses supplémentaires dans le domaine de la santé et des retraites.
Un vieillissement variable
Mais à mesure que la population vieillit, il faudrait reculer l’âge standard des personnes âgées. « L’alternative préférable serait de fonder les mesures du vieillissement sur le temps qui reste à vivre », argumentent deux chercheurs américains dans PLOS One. Et pour cause : être âgé de 65 ans n’a pas le même poids selon le niveau de revenu ou le pays de résidence. « Si on connaît la longévité de chaque individu, cela change aussi la donne en matière de retraite, confirme Philippe Rollandin. A un moment donné, on ne fixera plus un âge de départ commun à tout le monde, et un nombre d’années de cotisation. On déterminera un nombre d’années de retraite, 15 ou 20 ans par exemple. »
Car la population vieillit de manière globale, mais chacun ne bénéficiera pas de la même longévité. D’ici 2030, 6 ans d’espérance de vie devraient séparer les quartiers aisés et défavorisés de la capitale britannique. Un écart similaire à celui entre le Royaume-Uni et le Sri Lanka. Ces inégalités s’appliqueront au reste des pays occidentaux, selon Philippe Rollandin.
L’espoir du dépistage génétique
Il y a toutefois une lueur d’espoir. Grâce au dépistage génétique, il serait possible de repérer les mutations génétiques qui prédisposent à certaines maladies… et donc de les guérir. « Les grandes maladies qui tuent beaucoup aujourd’hui – je pense en particulier au cancer – seront guérissables, même si elles ne seront pas éradiquées », anticipe le journaliste.
(1) Le monde cannibale – Le défi démographique de 2065, Philippe Rollandin, paru aux éditions L’Harmattan