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Il boit 56 shooters

Mort d’un client après un coma éthylique : le patron du bar poursuivi

Par la rédaction

Un gérant de bar est poursuivi pour homicide involontaire après avoir servi 56 shooters à un client, décédé des suites d’un coma éthylique.

PURESTOCK/SIPA

Il voulait remporter un concours de descente d’alcool. Sa victoire lui a coûté la vie. En octobre, un homme est décédé après avoir ingurgité cul sec 56 shooters, ces petits verres qui contiennent 5 à 10 cl d’alcool fort. Le procès du barman, poursuivi pour « homicide involontaire par manquement délibéré », s’ouvre aujourd’hui à Clermont-Ferrand.

4 grammes d’alcool / litre de sang

Les faits remontent au 24 octobre 2014. Ce vendredi soir, Renaud, 57 ans, est un peu déprimé. Sa fille lui propose de sortir avec elle et ses amis, comme elle le raconte au quotidien local La Montagne. Ils s’installent dans une pizzéria, se restaurent, et vont finir la soirée dans un bar du coin, le « Starter ».

Quelques verres plus tard, l’ambiance monte dans le bar. Renaud est en bien meilleure forme. « C’est alors qu’il a vu la grande ardoise, au-dessus du comptoir, sur laquelle était inscrit le record du nombre de shooters consommés dans une même soirée, témoigne sa fille. Il fallait faire plus de 55. Il a relevé le défi » - et l’a remporté d’un shot. Sa victoire lui vaudra l’honneur de voir son nom inscrit sur le tableau des champions, comme en témoigne ce cliché que le journal s’est procuré.


C’est en arrivant à son domicile, après avoir été raccompagné en voiture, que les choses se compliquent pour ce père de famille. Dans la nuit de vendredi à samedi, il est pris de violents vomissements et sombre dans un coma éthylique. Transporté aux urgences, il meurt à l’hôpital d’un arrêt cardiaque, avec un taux d’alcoolémie de 4 grammes par litre de sang.

« Plus que 12 ! »

Aujourd’hui, le gérant du « Starter » est accusé d’avoir poussé Renaud à s’alcooliser et d’avoir ainsi précipité sa mort. Après avoir perdu son père, la jeune fille a en effet décidé de porter plainte contre lui. « Ces verres, personne ne les a mis dans sa bouche, reconnaît-elle. Mais il y a des trucs, comme l’ardoise affichant le record, qui incitaient à la surenchère, c’est évident ». Par ailleurs, alors que Renaud enchaînait de plus en plus difficilement ses shooters, le barman lui aurait glissé à l’oreille : « plus que 12 ! ».

Une version démentie par la défense
, qui affirme que le gérant a demandé à l’homme de s’arrêter, en vain. « On ne peut pas non plus, quand on est patron d’un établissement, lorsqu’il y a une commande qui est passée, vérifier qui boit quoi, a insisté son avocat. On ne peut pas être derrière chaque client. Il y a une responsabilité des clients et de leur entourage ».
Dans les pages de La Montagne, le gérant veut se dédouaner. « Ces concours, ce n’est pas mon idée. C’est un truc entre mes clients, souvent des jeunes, qui aiment se lancer des challenges de ce style ».

Les barmans responsables des clients ?

« Le simple fait de servir de l'alcool à une personne ivre est une contravention », avait rappelé, à l’époque des faits, la procureure de la République adjointe de Clermont-Ferrand sur le site de France Info. De fait, l’article L3353-2 du Code de la Santé Publique indique que « le fait pour les débitants de boissons de donner à boire à des gens manifestement ivres ou de les recevoir dans leurs établissements est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la 4e classe » (à savoir 750 euros maximum).

La qualification des faits en homicide involontaire relève, en revanche, de la non-assistance à personne en danger et de l’incitation à la consommation. Cette interprétation du droit est au cœur du procès qui s’ouvre ce lundi.