Le suicide des jeunes enfants inquiète les Etats-Unis. C’est une étude parue dans le JAMA Pediatrics qui a lancé l’alerte : la part de passages à l’acte chez les Afro-américains âgés de 5 à 11 a doublé depuis 1993. Chez leurs pairs à la peau blanche, elle a stagné, voire reculé. Et la pendaison ou la suffocation sont de loin les méthodes « privilégiées » par ces enfants (78 %).
En France, les statistiques ne sont pas aussi précises. Les dernières données publiées sur cette classe d’âge datent de 2011. Les chiffres de l’Insee estiment à 36 le nombre de décès par suicide chez les 5-14 ans, soit 5 % des décès totaux dans cette tranche d'âge. Un nombre stable : en 2009, ils étaient 37 à mettre fin à leurs jours. « Heureusement, c’est quand même très rare », souligne le Pr Antoine Pelissolo, psychiatre à l’hôpital Henri-Mondor (Créteil). Mais la façon de recueillir ces données ne permet pas réellement de déterminer quels enfants sont plus exposés au passage à l’acte.
Plutôt des pré-adolescents
Mais qu’est-ce qui pousse des enfants si jeunes à mettre fin à leurs jours ? A partir d’environ 10 ans, ils sont capables de comprendre le caractère définitif de leur acte. Mais la pulsion à l’origine du passage à l’acte, elle, aurait plus de force. « C’est un peu le même mécanisme que chez l’adulte, mais pas pour les mêmes raisons, analyse le Pr Pelissolo. Ce n’est pas tout à fait la mort pour la mort, mais pour passer à l’acte, trouver une solution face à un problème. »
Les suicides chez les jeunes enfants touchent donc plutôt les « pré-adolescents » (8-12 ans). Leur profil est également particulier. « Ce sont surtout des enfants qui sont dans des états dépressifs clairs. Le niveau de gravité est supérieur à la dépression habituelle, et il est accentué par des facteurs familiaux, des conditions de vie ou de souffrance importante, explique Antoine Pelissolo. Leur profil de personnalité est particulier : ils présentent une tendance à l’isolement, à échapper au quotidien. Ces tendances existent en dehors de la dépression. »