Trop en retard pour petit-déjeuner ? Mauvais calcul. De plus en plus d’enfants et d’adolescents sautent ce repas essentiel de la journée. Et cela s’en ressent directement sur leurs résultats scolaires, selon les résultats d’un rapport publié par la Banque Alimentaire d’Australie et intitulé « Hunger in the Classroom » (Faim en Classe).
Les auteurs de cette enquête ont sondé l’impact des habitudes alimentaires dans 500 écoles primaires et collèges du pays. Plus des deux tiers (67 %) des enseignants australiens se plaignent ainsi de voir arriver des enfants affamés le matin et incapables de se concentrer comme ils le devraient.
Des élèves léthargiques et dissipés
En effet, selon ces professeurs, les enfants qui ne déjeunent pas le matin perdent, à la fin de la journée, deux heures d’apprentissage comparé à leurs camarades qui se nourrissent au réveil. Un chiffre étonnant, qui s’expliquerait par une moindre capacité à mémoriser les informations.
Ainsi, 73 % des enfants qui sautent ce repas auraient des difficultés à se concentrer et 66 % deviendraient léthargiques à mesure que les heures de la matinée passent. Par ailleurs, plus de la moitié de ces enfants se montrent dissipés et manifestent un comportement problématique (irritabilité, colère, tristesse…).
En France, ces résultats n’étonnent pas vraiment les spécialistes. « Le matin, l’organisme sort d’une période de jeûne, explique Arnaud Cocaul, médecin nutritionniste attaché à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. Plus précisément, il est en période post-absorptive. C’est là où l’extraction calorique des aliments est utilisée au maximum par le cerveau : tout ce qui est lipide et glucide n’est pas stocké, mais bien détourné par l’organisme pour l’aider à se redynamiser après cette étape de jeûne qu’est la nuit. Le fait de déjeuner le matin permet effectivement d’optimiser ses capacités cérébrales ».
Un phénomène en hausse
Si ce constat ne fait pas l’ombre d’un doute, il n’en demeure pas moins qu’en France, les enfants sont toujours plus nombreux à sauter le petit déjeuner. En mai 2014, le Crédoc (Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie) a publié sa traditionnelle enquête sur les « Comportements et Consommations Alimentaires ». Ses résultats suggèrent une très forte dégradation de la prise quotidienne du petit-déjeuner, avec une baisse particulièrement visible chez les enfants. En effet, 29 % des jeunes sondés ont rapporté avoir sauté au moins un petit-déjeuner pendant la semaine, contre 11 % dix ans plus tôt !
Faute de temps ou de sommeil, il est de plus en plus courant de faire l’impasse sur le petit-déjeuner. Or, cela semble avoir des répercussions tout au long de la journée, notamment parce que le petit-déjeuner conditionne les comportements alimentaires qui eux-mêmes sous-tendent, en partie, les capacités cognitives. « Les études montrent que sauter ce repas implique de mauvais choix alimentaires le reste de la journée, poursuit Arnaud Caucol. Les personnes qui ne se nourrissent pas au réveil peuvent opter le midi pour une alimentation plus riche en calorie et en lipides, dépourvue de minéraux et de vitamines. Cela se traduit par une mauvaise assimilation le restant de la journée sur le plan des performances intellectuelles ».
Retard, absentéisme : le burn-out des enfants
L’étude australienne suggère que les enfants et adolescents qui sautent le petit-déjeuner ont une tendance au retard et à l’absentéisme plus marquée que les autres. Là aussi, le lien n’est pas si saugrenu, selon Arnaud Cocaul. « Les parents pressent les enfants de manger à toute vitesse le matin et s’ils n’ont pas le temps, alors, le repas saute. En fait, on tire sur la corde, surtout chez les enfants en bas âge qui ont des journées très chargées. Sauter ce repas se fait au détriment de la digestion et de l’assimilation des informations scolaires. Au bout d’un moment, les enfants craquent et font un burn-out, à leur niveau. »