Le rythme s’accélère. Après la délivrance en février dernier d’une autorisation de mise sur le marché par l’Agence sanitaire américaine (FDA), pour le traitement des cancers du poumon épidermoïdes non à petites cellules, le nivolumab suscite de nouveaux espoirs.
Les résultats présentés samedi 30 mai à l’ASCO, le congrès annuel de la Société américaine d’oncologie clinique – grand messe de l’oncologie mondiale –, montrent que le nivolumab serait plus efficace, mais aussi mieux toléré que le traitement standard, pour la prise en charge en seconde ligne des cancers non épidermoïdes non à petites cellules. Des résultats qui pourraient faire évoluer les recommandations thérapeutiques pour ces cancers.
Options thérapeutiques limitées
Les cancers bronchiques non à petites cellules, ou CBNPC, regroupent plusieurs types de tumeurs, et représentent près de 80 % de l’ensemble des cancers bronchiques. Jusqu’à maintenant, les patients avec un cancer non épidermoïde non à petites cellules avancé (ou adénocarcinome), dont la maladie continue à progresser après un traitement par chimiothérapie avec des sels de platine, ont peu d’options thérapeutiques. Le traitement standard dit « de seconde ligne » est aujourd’hui le docétaxel, un autre type de chimiothérapie.
« Mais le pronostic pour ces patients reste mauvais, explique Gérard Zalcman, pneumo-oncologue au CHU de Caen. Et cette chimiothérapie présente un rapport bénéfices/toxicité qui pose problème. »
Survie augmentée, effets secondaires diminués
Le nivolumab pourrait cependant changer la donne très rapidement. Cet anticorps « anti-PDL1 » (voir encadré) avait déjà démontré une augmentation de la survie globale des patients atteints d’un cancer du poumon non à petites cellules épidermoïde et présentant des métastases. Les résultats de l’essai de phase III présentés à l’ASCO ce samedi confirment cette efficacité, mais cette fois-ci chez des patients atteints d’un cancer non épidermoïde non à petites cellules en échec thérapeutique après une première chimiothérapie. Pour Fabrice Barlési, pneumo-oncologue à l'hôpital Nord de Marseille et co-auteur de ces travaux, les résultats de cet essai, associés aux précédents, sont une « révolution ».
Chez les 292 patients ayant bénéficié de ce traitement, la survie moyenne a augmenté approximativement de 3 mois, en comparaison des 290 patients traités par docétaxel. L’essai clinique avait aussi pour but d’évaluer la sécurité du nivolumab, et les résultats sont rassurants.
Le traitement a provoqué moins d’effets secondaires (fatigue, nausées, etc) que le docétaxel. « Les immunothérapies ne provoquent pas les mêmes désagréments que les chimiothérapies, mais elles ne sont pas exemptes d'effets secondaires, prévient cependant Gérard Zalcman. Ces effets indésirables sont différents de ceux que l'on voyaient jusqu'ici, ils sont le plus souvent dus à des réactions auto-immunes, mais il faudra avoir plus de recul pour mieux les connaître. »
Les check-point inhibitors
Au-delà des classiques chimiothérapies, une autre piste thérapeutique est explorée depuis une dizaine d’année pour le traitement de différents types de cancer : l’immunothérapie. Alors que les chimios ciblent les cellules cancéreuses, les immunothérapies visent, elles, à redonner au système immunitaire les capacités à « se battre » efficacement contre les cellules cancéreuses. Parmi les méthodes développées, celle dite des « check-point inhibitors » a pour but de lever les blocages que la tumeur provoque sur les cellules T. Le nivolumab est un anticorps monoclonal qui cible spécifiquement le système PD1-PDL1.
Le prochain traitement standard ?
Face à de tels résultats, le nivolumab est-il en passe de détrôner le docétaxel ? La question était au cœur des discussions au congrès de l’ASCO. Pour Gérard Zalcman, « le docétaxel est en train de vivre ses dernières années. »
Un avis que partagent de nombreux experts présents au congrès, dont Fabrice Barlési : « Le bénéfice en terme de survie et le meilleur profil de tolérance par rapport à la chimiothérapie font qu'on peut considérer le nivolumab comme un nouveau standard dans cette indication et en deuxième ligne. »
Le spécialiste souligne cependant que le traitement n'est efficace que chez certains patients, et que l'enjeu est aujourd'hui de comprendre pourquoi. Ceci permettrait de développer des tests pour identifier ceux à qui la molécule peut bénéficier le plus.
Actuellement, le nivolumab dispose (depuis le 5 janvier) d’une autorisation temporaire d’utilisation (ATU) en troisième ligne, c’est-à-dire lorsque deux traitements sont restés en échec. Ces nouveaux résultats devraient permettre d'élargir les indications de cette ATU, et peut-être accélérer le processus d'autorisation de mise sur le marché par l'Agence nationale de sécurité du médicament.
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