En 50 ans, le visage du diabète a radicalement changé. Les traitements ont évolué, les connaissances se sont précisées. Un symposium est revenu sur un demi-siècle de travaux sur le sujet, lors du Congrès annuel de l’Association américaine du diabète (ADA), qui se tient à Boston (Massachussetts, Etats-Unis) du 5 au 9 juin. Les experts sont tombés d’accord sur un point : de la surveillance au traitement actif, la vie des diabétiques s’est considérablement améliorée.
Au milieu du XXe siècle, l’espérance de vie des diabétiques n’était pas bonne. La plupart ne pouvait pas espérer vivre au-delà de 40 ou 50 ans. Aujourd’hui, l’espérance de vie des diabètiques de type 1 est raccourcie d’une dizaine d’années par rapport à la polutation générale. Même si elle s’est considérablement rallongée, comme en témoigne l’étude Pittsburgh Epidemiology of Diabetes Complications : entre la période 1950-1964 et la période 1965-1980, la mortalité à 30 ans est passée de 36 % à 12 %. Lors du symposium, une patiente en a témoigné : âgée de 86 ans, Kathryn Ham a évoqué ses 78 ans passés avec un diabète de type 1. « Les données sont très encourageantes, en particulier la diminution de la survenue des différentes complications », estime le Pr Pierre Gourdy, endocrinologue au CHU de Toulouse (Haute-Garonne).
L'arrivée de l'hémoglobine glyquée
Premier changement majeur : le test de la glycémie. Les médecins sont passés de la détection de sucres dans les urines à une surveillance du glucose dans le sang. Un nouvel outil précieux est apparu : l’hémoglobine glyquée, qui mesure le taux de glucose sur 3 mois. « Cela nous donne un marqueur utile, qui montre si un patient est sur la bonne voie ou non », a témoigné le Dr Fred Whitehouse, du Henry Ford Health System (Detroit, Michigan, Etats-Unis). Le Pr Gourdy lui aussi salue les nouvelles méthodes de suivi du diabète, notamment les capteurs de glucose.
Résultat logique de cette amélioration de la surveillance, les complications du diabète sont aussi mieux liées avec une glycémie mal équilibrée. « On sait maintenant qu’une glycémie élevée de manière prolongée augmente le risque de complications rénales et oculaires associées au diabète, et que maintenir un contrôle plus strict des taux de glucose dans le sang réduit ce risque », a expliqué Michael Brownlee, médecin américain. Il évoque également la « mémoire métabolique », mise en évidence récemment : même après des années de glycémie équilibrée, les dégâts d’un mauvais contrôle persistent.
Une recherche en progrès
« Certaines choses, qui se sont passées au cours des 50 dernières années, améliorent la vie des gens », estime Fred Whitehouse. L’insuline est le meilleur exemple de cette évolution. Les premières disponibles provenaient d’animaux. Les effets secondaires étaient lourds et très variables selon les patients. Les produits proviennent maintenant de cellules humaines et comportent moins d’effets secondaires. Leur mode d’action a aussi progressé. Désormais, des insulines d’action longue et d’action rapide existent, à combiner selon les besoins.
Daniel Porte, qui conduit des recherches sur le diabète depuis plus de 50 ans, témoigne d’un changement total de la perception de cette maladie. Au milieu du XXe siècle, le glucose était considéré comme le seul régulateur de l’insuline. Les médecins considéraient aussi qu’il n’existait aucune interaction entre les systèmes endocrinien et nerveux. « Cette année, on a découvert que l’insuline envoyée vers le système nerveux central n’alimente pas seulement le cerveau, elle affecte aussi la production de glucose, rappelle ce chercheur. Il y a donc une intégration complète du système endocrinien et du système nerveux. Il a fallu 40 ans pour le découvrir. » Les 50 prochaines années devraient encore améliorer le contrôle de la maladie, espère le Pr Pierre Gourdy.
Les participants au symposium veulent aussi croire en l'avenir d'un diabète bien contrôlé qui évitera les complications. « Les 50 ans prochaines années devront élucider les mécanismes d’apparition du diabète de type 1 et du diabète de type 2, conclut Robert Ratner, Directeur scientifique et médical de l’ADA. Les traitements doivent offrir un contrôle optimal de la glycémie et du métabolisme, sans risque d’hypoglycémie ; les complications du diabète deviendront alors de lointains souvenirs. »