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Shoot en salle

Par Philippe Berrebi

La santé est en phase de réveil, nous apprend aujourd’hui Eric Favereau dans Libération. Hôpital, médecine de proximité, nominations à des postes clés, Marisol Touraine a ouvert plusieurs chantiers figurant au programme de François Hollande. Mais il y en a un sur lequel le cabinet du ministre de la Santé se veut beaucoup plus discret : les salles de shoot.
Hier, dans le Parisien, le député socialiste Jean-Marie Le Guen a ouvert une brèche en appelant le gouvernement à donner son feu vert à de telles structures d’accueil. Il s’agit de salles de consommation de stupéfiants où les toxicomanes ont accès à un matériel stérile et où un accompagnement par des professionnels de  santé leur est proposé. L’augmentation de la consommation d’héroïne, notamment dans la capitale, justifie, selon le député PS, l’ouverture de ces salles.
Un constat partagé par des associations qui gèrent des programmes de distribution de seringues. « Les injections sur la voie publique, dans les sanisettes ou dans les parkings, sont effectivement en augmentation »,  confirme la directrice de l’association Safe dans le Figaro, et ce depuis 2009. Pour Catherine Duplessy, « il y a urgence ».

Une réflexion est en cours, reconnaît du bout des lèvres l’entourage du ministre de la Santé. Mais pourquoi faire preuve d’une telle discrétion alors même que le choix des villes qui pourraient expérimenter ces salles serait pratiquement arrêté ? Tout simplement parce que le sujet divise et que l’opposition veut  en faire un combat politique. D’ailleurs, elle n’a pas tardé à réagir : « ouvrir des salles de consommation de drogues(…), c’est banaliser l’usage et légaliser la consommation des drogues les plus dures au frais des contribuables », a indiqué l’UMP.
Même au sein de la communauté scientifique, les salles de shoot divisent, observe la journaliste du Figaro. «  Ce n’est pas une panacée, résume Marc Valleur, responsable du centre Marmottan à Paris, mais les évaluations de tels dispositifs à l’étranger ont déjà montré un impact positif sur la santé des toxicomanes et une diminution des nuisances sur la voie publique lorsque ces lieux d’accueil sont ouverts dans des quartiers où les consommateurs de stupéfiants sont déjà implantés ».

Alors, le gouvernement va-t-il, comme le souhaite Jean-Marie Le Guen, développer une politique ambitieuse de réductions des risques » ou, au contraire, décider que le sujet est trop sensible ? A l’heure où les observateurs commencent à faire l’inventaire des promesses envolées du candidat Hollande, la presse ne manque pas de rappeler que l’élu socialiste s’était montré intéressé par ce type d’expérimentation.