Avant même d'atterrir sur le bureau de Marisol Touraine, ce document fait déjà jaser. Dans un projet de rapport annuel sur les charges et produits de l'Assurance maladie pour 2016, la direction de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) suggère aux pouvoirs publics des pistes pour réaliser 715 millions d'euros d'économies sur les dépenses de santé en un an (en 2016). En s'appuyant sur 31 mesures, elle espère au final faire près de 3 milliards d'euros d'ici trois ans.
Développer l'ambulatoire
Première piste avancée par l'Assurance maladie et dévoilée par l'Agence France Presse (AFP), la poursuite du développement de l'ambulatoire à l'hôpital. Ce dispositif vise à écourter les durées de séjour, notamment après un accouchement (de 4,2 à 3 jours) ou à la suite d'opérations orthopédiques. Elle devrait permettre d'économiser à elle seule 836 millions d'euros sur trois ans.
Par ailleurs, environ 546 millions d'euros d'économies sur trois ans pourraient également être trouvés dans la régulation des dépenses de transport de patients, qui ont explosé ces dernières années en raison d'un recours accru aux taxis.
De plus, ce rapport vient mettre un accent particulier sur la prévention de l'obésité, du diabète et autres pathologies chroniques, ainsi qu'une amélioration de l'accès aux soins, notamment aux soins dentaires, pour éviter les dépenses ultérieures liées à l'aggravation de ces pathologies. La prévention des insuffisances rénales chroniques permettrait à ce titre d'économiser 127,5 millions d'euros.
Les médecins vent debout
Enfin, la CNAMTS s’insurge contre le coût très élevé des prescriptions des médecins qui ne prennent pas assez en compte « le rapport coût-efficacité des traitements, au-delà de leur seule efficacité ». Elle appelle donc les praticiens à revoir leurs ordonnances, pour poursuivre les efforts déjà réalisés dans la prescription de génériques notamment, ou pour enrayer la hausse des arrêts maladie (300 millions d'euros d'économies possibles sur trois ans).
Le rapport indique, par exemple, qu'un meilleur respect des recommandations sur les prescriptions de médicaments antidiabétiques permettrait d'économiser 336 millions d'euros. Cette recommandation a entraîné la colère de la CSMF (1), le principal syndicat de médecins libéraux, qui a écrit dans un communiqué de presse qu'elle s’opposera toujours à « une approche purement comptable de la santé des patients ».
La CSMF rappelle que l’utilisation de certains médicaments, au-delà des indications dites remboursables par la Caisse, ont rendu un grand service à la population. « C’est le cas de l’aspirine utilisée comme antiagrégant plaquettaire, hors "indications remboursables" », souligne-t-elle.
Le syndicat conclut que les médecins ont « certes une responsabilité médico-économique, mais la prescription médicale ne s’appuie pas seulement sur des recommandations statistiquo-financières. Elle est avant tout guidée par des règles de bonnes pratiques et en s’adaptant à chaque patient, qui reste la préoccupation essentielle du médecin ».
(1) Confédération des Syndicats Médicaux Français