Vous ne sauriez sans doute pas dire combien vous avez de contacts enregistrés dans votre téléphone portable, mais ils sont nombreux. De la baby-sitter en passant par votre employeur, votre conjoint ou vos enfants, votre smartphone abrite pour ainsi dire toute votre vie. Et peut-être même une bonne partie de votre mémoire. C’est en tout cas ce que suggère une étude du cabinet de sécurité informatique Kaspersky, relayée par Le Point.
Véritable doudou technologique, le smartphone nous donne le sentiment de ne jamais pouvoir être pris au dépourvu. Panne de voiture, retard de train, bus qui n’en finit pas d’arriver : aucun souci, il suffit de dégainer son portable pour prévenir la personne concernée.
Et puis un jour, un pépin survient, on fouille frénétiquement dans son sac, ses poches. Catastrophe, on réalise que ce qui est presque devenu une extension de nous-mêmes est resté sur notre bureau ou à la maison. Même sentiment profond d’abandon en cas de batterie à plat.
Si vous n’êtes pas de la génération des « digital natives », ceux nés dans un environnement numérique déjà développé, vous avez encore le souvenir de la bonne vieille cabine téléphonique, ultime solution qui pourrait à ce moment précis vous sortir du pétrin.
Mais, en admettant que vous ayez réussi à localiser une des dernières cabines – en état de marche ! – face au clavier, vous réalisez que le numéro de votre interlocuteur, vous ne le connaissez pas ! Et pourtant, c’est votre mari, ou votre fille, que vous cherchez à joindre ! Le diagnostic est sans appel : vous souffrez d’amnésie numérique.
L’étude du cabinet Kaspersky, menée dans six pays européens, révèle ainsi que la moitié des Français ne connaissent pas le numéro de leurs enfants ou de leur lieu de travail. Des chiffres qui se retrouvent à l’échelle européenne. Un tiers de Français déclarent même que « leur smartphone contient à peu près tout ce qu’ils doivent savoir ou se rappeler » et quatre sur dix estiment qu’ils seraient « dévastés » de perdre les données contenues dans leur smarphone, seul lieu de sauvegarde de leur carnet d’adresses, mais aussi de leurs « souvenirs ». Un constat qui n’est pas affaire de génération, puisque la tendance se retrouve dans toutes les tranches d’âges, aussi bien chez les hommes que chez les femmes.
Pour Laurence Allard, Maître de conférences et Sociologue des usages innovants à l'Université Lille 3/IRCAV-Paris 3, citée par La Vie Numérique : « Le smartphone est également le support d'usages mémoriels et fait pour certains office de « prothèse cérébrale ».
Mais face à une société dont les usages multiplient l’utilisation de numéros de téléphone, d’adresses mail, mais aussi de codes et de mots de passe, beaucoup ont le sentiment de ne pas avoir la capacité mnésique suffisante pour tout retenir. Dans cette enquête, ce sentiment est partagé par 9 personnes interrogées sur 10. L’amnésie numérique ne serait-elle donc qu’un comportement adaptatif aux évolutions de notre société ?
Le Dr Kathryn Mills, de l’UCL Institute of Cognitive Neuroscience de Londres, qui commente ces chiffres pour le cabinet Kaspersky, se veut rassurante. Elle rappelle en effet que : « Le fait d’oublier n’est pas en soi une mauvaise chose. Nous disposons d’une formidable faculté d’adaptation et nous ne nous souvenons pas de tout, car ce n’est pas dans notre intérêt. L’oubli devient cependant un handicap lorsqu’il porte sur des informations qu’il nous faut impérativement retenir ».