Des souris sourdes depuis la naissance ont retrouvé l’audition grâce à la thérapie génique. Une prouesse pleine d’espoir réalisée par des chercheurs américains de l’Hôpital pour enfants de Boston, la faculté de médecine de Harvard, associés à des chercheurs de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (Suisse). Ces derniers présentent leurs travaux dans la revue Science Translational Medicine parue ce mercredi.
En France, près de 800 enfants sont touchés par la surdité chaque année. Trois quarts d’entre elles sont d’origine génétique (anomalies de l’oreille) et les autres sont acquises au cours de la grossesse ou après la naissance.
Les progrès en génétique ont permis d’identifier plus de 70 gènes en cause. Parmi eux, les chercheurs se sont intéressés au gène TMC1, principal responsable des surdités génétiques, qui code pour une protéine cruciale impliquée dans le fonctionnement des cellules ciliées. Présentes dans la cochlée (un organe creux en forme d’escargot situé dans l’oreille interne), elles sont capables de transformer les vibrations en signaux électriques transmis au cerveau via le nerf auditif.
Deux modèles de souris étudiés
Les scientifiques ont utilisé deux modèles de souris modifiées génétiquement. La première, dépourvue du gène TMC1, imite les mutations récessives observées chez les humains, par exemple, lorsqu’un enfant hérite de sa mère et de son père d’une mutation du gène. Cet enfant souffrira d’une perte d’audition profonde dès 2 ans.
L’autre souris, appelée Beethoven, est porteuse d’une mutation spécifique dite dominante. Dans cette forme de surdité, beaucoup plus rare que la première, une copie suffit pour que l’enfant perde progressivement l’audition à partir de 10 ou 15 ans.
Dans ces deux cas, les troubles auditifs sont liés à une destruction totale ou partielle des cellules ciliées.
Pour rétablir l’audition de ces souris, les chercheurs ont alors tenté de les régénérer. Pour cela, ils ont inséré une version du gène non muté dans un virus puis ont injecté l’ensemble dans l’oreille interne des souris, dans l’espoir que le virus infecte les cellules ciliées et intègre ce nouveau gène dans leur ADN.
L'ouïe restaurée en quelque semaines
Un mois plus tard, les résultats sont surprenants. Grâce à la thérapie génique, les cellules ciliées du premier modèle sont à nouveau capables de produire des signaux électriques. Les souris entendent et réagissent aux sons ! En revanche, pour les autres souris, les tests auditifs ont été moins concluants, mais la thérapie génique a restauré en partie l’ouïe des souris.
« Notre protocole n’est pas encore prêt pour des essais cliniques – nous devons encore le peaufiner un petit peu – mais nous pensons pouvoir développer son usage thérapeutique pour l’homme dans un futur pas si lointain », explique Jeffrey Holt, chercheur à l’Hôpital pour enfants de Boston et professeur à Harvard. Il espère entamer les essais cliniques chez l’homme d’ici à 10 ans.