Dans un contexte où trois Français sur dix avouent ne pas avoir confiance dans les vaccins, le chercheur Pierre Verger et son Unité Inserm (1) ont questionné 1 500 généralistes sur leurs pratiques et hésitations par rapport au calendrier vaccinal. Des travaux publiés il y a quelques jours dans la revue scientifique Ebiomedicine.
Réservés sur le rôle des adjuvants
Premier constat rassurant, la quasi-totalité des médecins interrogés (96 %) se disent confiants dans leur capacité à expliquer l’utilité des vaccins à leurs patients. Néanmoins, ce chiffre tombe à 43 % lorsqu’il est question de parler du rôle des adjuvants, et de justifier leur utilisation.
Deuxième constat, les recommandations des généralistes varient selon la situation vaccinale : 83 % recommandent souvent, voire automatiquement, aux adolescents et jeunes adultes le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR), mais seulement 57 % conseillent le vaccin contre les infections à méningocoques de type C aux enfants et aux jeunes, âgés de 2 à 24 ans, alors que celui-ci est inscrit dans le calendrier vaccinal. Pareil pour la rougeole.
« Leur hésitation à vacciner pourrait ainsi renforcer celle des patients, et contribuer à l’insuffisance des couvertures vaccinales, en particulier celles des vaccins controversés », estiment les auteurs de cet article.
Doutes sur les effets secondaires
Par ailleurs, une majorité des médecins fait « plutôt ou tout à fait confiance » au ministère de la Santé (8 médecins sur 10) ou aux agences sanitaires (9 médecins sur dix) pour leur fournir des informations fiables sur les bénéfices et les risques des vaccins. « Certaines incertitudes subsistent face aux risques et à l’utilité de certains vaccins », soulignent toutefois les auteurs.
Plus en détail, des médecins ont ainsi exprimé des doutes à l’égard des risques d’effets secondaires graves de certains vaccins, même lorsque ces doutes sont infirmés par les résultats de pharmacovigilance et des études épidémiologiques (par exemple, concernant le vaccin contre l’hépatite B et la présence d’adjuvants dans certains vaccins).
6 % des médecins interrogés considèrent par exemple probable, voire très probable, l’existence d’un lien entre le vaccin contre le papillomavirus et l’apparition de maladies neurodégénératives telles que la sclérose en plaques. Et plus d’un quart d’entre eux (26 %) considère par ailleurs que certains vaccins recommandés par les pouvoirs publics sont inutiles, et 20 % estiment même que les enfants sont vaccinés contre trop de maladies.
Les auteurs concluent que « ces hésitations ne touchent, pour le moment, qu’une part minoritaire des médecins généralistes (d’ailleurs variable selon le vaccin), mais constituent un frein supplémentaire dans le maintien d’une couverture vaccinale de la population suffisante pour la protéger contre des maladies infectieuses qui restent dangereuses. »
L'étude souligne aussi leur besoin de formations et d’outils pour les aider à répondre aux patients hésitant à se vacciner.
(1) Unité Inserm 912 « Sciences Economiques & Sociales de la Santé et Traitement de l’Information Médicale – SESSTIM »