C'est ce qu'on appelle couramment la double peine ! Ce jeudi, le Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté (CGLPL) a publié un avis relatif à la prise en charge des personnes détenues au sein des établissements de santé. Le bilan est sans appel. Bon nombre des droits des détenus hospitalisés sont bafoués. Cela, alors même que ces patients disposent, en principe, des mêmes droits d’accès aux soins que tous les autres « sous réserve des restrictions liées à la privation de liberté d’aller et venir dont ils font l’objet ».
Les extractions médicales trop nombreuses
Pour commencer, la magistrate Adeline Hazan constate que « de trop nombreuses extractions médicales sont rendues nécessaires du fait du faible nombre de spécialistes intervenant en détention ». Le CGLPL préconise ainsi un renforcement de la présence de spécialistes au sein des unités sanitaires, mais aussi qu’une réflexion soit menée afin que les personnes détenues remplissant les conditions légales bénéficient de permissions de sortir pour se rendre seules dans un établissement de santé.
L'autorité indépendante souligne qu'actuellement, les modalités des extractions médicales ne sont pas satisfaisantes. Le CGLPL constate en effet que, pour une grande partie, des détenus sont menottés et entravés lors du transfert, mais aussi durant les consultations et examens médicaux, voire parfois même pendant les interventions chirurgicales.
Une des solutions préconisée est le recours à la télémédecine, qui, en milieu carcéral, serait « un dispositif de nature à permettre un accès rapide et de qualité aux médecins spécialistes », selon la magistrate.
Le secret médical inapplicable
Autre inquiétude d'Adeline Hazan, la présence des personnels d’escorte lors des consultations ou examens médicaux qui ne permet pas « d’assurer le respect du secret médical ». Le CGLPL recommande donc que les consultations médicales se déroulent hors de la présence d’une escorte et que la surveillance soit indirecte (hors de vue et d’oreille du patient détenu).
Aucune intimité dans les chambres
Pire encore, une fois dans leur chambre d'hôpital, la condition des détenus n'est pas satisfaisante. L’aménagement et l’équipement des chambres sécurisées répondraient trop souvent aux seuls critères de sécurité et ressemblent alors davantage « à un lieu de détention qu’à un lieu de soins ».
Ainsi, dans certains établissements, la configuration des locaux sanitaires ne permet pas le respect de l’intimité des patients (absence de rideau isolant les sanitaires du reste de la chambre par exemple).
Un renoncement aux soins grandissant à la clé
Du fait de cette situation, de nombreuses personnes détenues renoncent aux soins, déplorent le Contrôleur. Pour l'éviter, le CGLPL pense que des informations sur les conditions matérielles d’hospitalisation doivent être délivrées au patient détenu, en amont de son hospitalisation (liste des effets personnels autorisés et interdits), et à son arrivée dans l’établissement de santé (livret d’accueil relatif aux modalités d’hospitalisation dans les chambres sécurisées ainsi qu’aux droits afférents).
De plus, le Contrôleur appelle à faire respecter le droit fondamental au maintien des liens familiaux. Encore trop souvent, par exemple, l’accès au téléphone n’est pas effectif (absence de poste dans les chambres sécurisées et impossibilité de contrôler les conversations). Les patients détenus ne peuvent pas non plus recevoir de visites de leurs proches et de leur conseil, quel que soit leur statut pénal, et même si ces visiteurs sont titulaires de permis de visite habituellement.
Enfin, dans la quasi-totalité des chambres sécurisées, les patients détenus ne bénéficient d’aucune activité (pas de poste de télévision, de radio, de livres ou de journaux). Ils ne disposent pas non plus d’un espace extérieur permettant de s’aérer et, le cas échéant, de fumer. « Un téléviseur devrait être installé et des journaux devraient être mis à disposition », conclut l'avis du CGLPL.