C'est un coup de tonnerre qui vient de s'abattre sur le CHU de Reims. Contre toute attente, les médecins en charge de Vincent Lambert ne se sont finalement pas prononcés, ce jeudi 23 juillet, sur un arrêt ou non des traitements apportés à ce patient, en état végétatif irréversible depuis plus de sept ans. L’établissement a en effet annoncé en début d'après-midi qu’il suspendait la procédure collégiale mise en place le 8 juillet pour statuer sur sa situation. Il s'agit d'une victoire pour les parents du malade qui voulaient voir leur fils maintenu en vie à l'issue de ce conseil de famille.
Un appel au Procureur pour rétablir le sécurité
Dans un communiqué de presse, le CHU de Reims explique ainsi que « les conditions de sérénité et de sécurité nécessaires à la poursuite de la procédure ne sont pas réunies ». Il plaide donc pour le rétablissement « d’un échange serein, dans l’intérêt de Vincent Lambert et de son accompagnement ».
Pour la suite des évènements, le Dr Daniela Simon (en charge de Vincent Lambert) a indiqué qu'elle voulait saisir le procureur de la République pour que soit désigné un représentant légal du patient. Une décision motivée après qu'elle ait eu vent de projets d'enlèvement concernant son patient.
Le but de cette requête est de « mettre Vincent sous protection globale », a déclaré à l'Agence France Presse (AFP) François Lambert, le neveu de Vincent, favorable à l'arrêt des traitements.
L'appel à Marisol Touraine
Plus surprenant, Daniela Simon souhaite, par ailleurs, se référer au ministère de la Santé, quant aux suites à donner à ce dossier. Dans une déclaration écrite transmise à l’AFP, Marisol Touraine a d'ores et déjà indiqué qu'elle « apporte tout son soutien à l’équipe soignante ».
Dans son communiqué, la ministre écrit qu'elle pense que le corps médical « n’a pas pris cette décision parce qu’elle refuse d’arrêter le traitement de Vincent Lambert (...), mais parce qu’elle considère que les conditions de sécurité et de sérénité nécessaires pour mettre en œuvre ce type de décision ne sont pas réunies. »
Soutien du corps médical au Dr Simon
Autre soutien de poids récolté par l'équipe médicale de l'établissement, celui du Dr Eric Kariger, l'ex-médecin de Vincent Lambert. Dans un communiqué de presse diffusé à l'instant, il explique « respecter le Dr Simon qui fait de son mieux dans ce contexte particulièrement hostile. Mes pensées vont à mon ancienne équipe, à Vincent Lambert, son épouse et les membres de sa famille qui tentent de faire respecter sa personnalité et ses volontés », rajoute-t-il.
Dans le passé, ce médecin avait pour sa part démarré un protocole de fin de vie qu'il a dû stopper sous injonction des tribunaux.
Un drame de plus pour l'épouse de Vincent Lambert qui a toujours soutenu que son mari lui aurait confié que, dans de telles circonstances, il souhaiterait mourir dans la dignité.
Même empathie avec le Dr Simon, celle dont témoigne le Dr Vincent Morel, ancien président de la Société Française d'Accompagnement et de soins Palliatifs (SFAP). Contacté par Pourquoidocteur il confie : « Notre collègue de Reims n'a pas eu les conditions adéquates pour prendre la décision d'entamer un protocole de fin de vie. Je la soutiens parce que tout le monde sait très bien que, là-bas, il n'y a aucune sécurité, ni sérénité ».
Le Conseil national de l'Ordre des Médecins espère pour sa part que « cette demande permettra de créer les conditions d'un débat apaisé permettant une décision juste et acceptée de tous ». Dans son communiqué, le CNOM rend hommage au travail mené par l'équipe médicale de Vincent Lambert, « dans le respect de la dignité de Monsieur Vincent Lambert, et cela malgré les pressions parfois violentes dont elle fait l'objet et qui ont pu entraver son action ».
« Dans un état de droit, une telle situation ne devrait pas se produire. La décision collégiale des médecins d'arrêter l'obstination déraisonnable doit pouvoir s'appliquer. C'est conforme à la Loi Leonetti », rappelle Vincent Morel.
Pour le médecin, le cas Vincent Lambert « devient extrêmement compliqué. Surtout que de jour en jour, les tensions augmentent ». Pessimiste sur l'avenir de ce patient, il appelle les autorités « à mettre en place de véritables mesures de précaution » autour de lui.