La dengue menace une part croissante de la population mondiale. Aucun traitement n’est pour le moment disponible. Mais un candidat-vaccin devrait être examiné d’ici 2016 par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Une étude parue dans le New England Journal of Medicine (1) conclut que ce vaccin, développé par Sanofi Pasteur, pourrait éviter 80 % des hospitalisations pour dengue… chez les enfants de 9 à 16 ans.
Deux essais cliniques de phase III et un essai clinique de phase IIb ont été rassemblés dans cette étude sur le vaccin tétravalent contre la dengue. Au total, plus de 33 000 enfants (2-16 ans) ont participé aux recherches – dont 22 777 ont été vaccinés. Tous les ans, un rendez-vous avec des médecins a été organisé, doublé d’appels téléphoniques tous les 3 mois. Le paramètre principal de la surveillance était une admission à l’hôpital causée par la dengue. En effet, l’objectif était de « vérifier que la réponse immunitaire à la vaccination ne confère pas de prédisposition à une infection plus grave et que le risque n’augmente pas avec le temps ».
Les jeunes enfants moins protégés
Les enfants vaccinés ont reçu une dose initiale ainsi que des rappels à 6 et 12 mois. L’efficacité du vaccin n’est pas totale : elle est de 65,5 % chez les enfants de 9 ans et plus, et de seulement 44,6 % chez ceux qui moins de 9 ans. En revanche, le produit protège 93 % des grands enfants contre les formes les plus graves de la maladie, et 44,5 % des plus jeunes.
Cette différence dans la protection, c’est la donnée à retenir de cette étude, selon Cameron Simmons, de l’université de Melbourne (Australie), qui signe un éditorial associé à l’étude. Les auteurs de l’étude avancent plusieurs hypothèses pour expliquer la moins bonne immunité des jeunes enfants. Leur réaction au vaccin pourrait être de moins bonne qualité au sein de ce public qui est souvent dépourvu d’anticorps avant l’inclusion dans l’essai.
Des recherches à poursuivre
La première infection est moins sévère que la deuxième, soulignent les chercheurs. Dans le cas d’un enfant qui n’a jamais été exposé à la dengue, la vaccination pourrait s’apparenter à une primo-infection. La première exposition au virus sauvage prendrait donc la forme d’une deuxième infection, aux symptômes plus marqués. Enfin, l’âge lui-même est à prendre en compte : les jeunes enfants ont un système immunitaire partiellement immature.
Toutes ces considérations rendent nécessaire une poursuite des recherches. « Une immunité partielle, déclinante, est un résultat qui n’est pas le bienvenu après une vaccination, souligne Cameron Simmons. Les vaccins vivants doivent être suffisamment puissants dans leur potentiel infectieux et dans leur capacité de réplication pour initier une immunité à la fois chez les patients jamais exposés et ceux avec une immunité partielle. »
Les bienfaits du vaccin sont donc à confirmer. C’est d’autant plus important que les enfants sont les plus exposés au virus de la dengue.
(1) L’étude (Efficacy and Long-Term Safety of a Dengue Vaccine in Regions of Endemic Disease) a reçu le soutien de Sanofi Pasteur, qui développe le candidat-vaccin CYD-TDV. Plusieurs auteurs de l’étude sont employés par Sanofi Pasteur. Cameron Simmons, auteur d’un éditorial associé à l’étude (Candidate Dengue Vaccine Walks a Tightrope) a également déclaré des liens d’intérêt avec les laboratoires Sanofi Pasteur, Merck et GlaxoSmithKline.