Les personnes obèses atteintes de maladies cardiovasculaires ont moins de risque de faire un accident cardiovasculaire que les personnes maigres malades du cœur et des artères. Telle est la conclusion surprenante d’une vaste étude internationale publiée fin juillet dans l’European Heart Journal.
Ces travaux dirigés par le Pr Gabriel Steg, cardiologue, et le Dr Boris Hansel, endocrinologue et nutritionniste à l’hôpital Bichat-Claude Bernard (Paris), ont été conduits dans 44 pays du monde. Pendant 4 ans, les chercheurs ont suivi plus de 54 000 patients de plus de 65 ans à haut risque cardiovasculaire, soit parce qu’ils ont déjà subi un infarctus du myocarde ou un accident cérébral vasculaire (AVC), soit parce qu’ils présentent une hypertension artérielle, un diabète ou une athérosclérose.
Relation entre IMC et accidents cardiovasculaires
« On s’est intéressé à la relation entre l’indice de masse corporelle (IMC) et le risque de faire un accident cardiovasculaire, explique le Dr Boris Hansel. Et on a mis en évidence ce qu’on appelle le paradoxe de l’obésité indiquant qu’il n’y a pas une relation simple entre la corpulence et le risque d’évènement. »
De fait, leurs résultats montrent que les participants en surpoids ou obèses souffrant de pathologies cardiaques bénéficient d’une relative protection contre l’infarctus du myocarde et l’AVC. Les données indiquent, en effet, que ce risque est réduit de 22 % chez les patients en surpoids, de 28 % chez les obèses modérés et de 37 % chez les participants avec une obésité sévère comparés aux personnes de poids normal. A l’inverse, les patients maigres ont deux fois plus de risques de mourir d’un infarctus ou d’un AVC.
L'IMC, un mauvais indicateur prédictif
« On pourrait imaginer que les personnes obèses sont protégées parce qu’elles sont mieux traitées et suivent des traitements préventifs comme les statines ou des fluidifiants sanguins. Mais grâce à l’importance de notre population, nous avons pu montrer que cela ne suffit pas à expliquer le paradoxe de l’obésité », commente le médecin.
En revanche, les chercheurs suggèrent une seconde hypothèse expliquant ce paradoxe : l’indice de masse corporelle ne reflète pas, dans cette population, la toxicité de l’excès de poids, car il n’indique pas la localisation et la nature de la mauvaise graisse. On sait en effet que les maladies cardiométaboliques sont favorisées par l’obésité abdominale, aussi appelée viscérale. Or, l’IMC ne permet pas de faire la différence entre masse musculaire et masse adipeuse. « D’ailleurs, selon l’Organisation mondiale de la santé, l’obésité n’est pas définie par l’IMC mais par un excès de graisse qui peut nuire à la santé », rappelle le spécialiste. Ce dernier propose ainsi de combiner plusieurs mesures, comme celle du tour de taille, afin de mieux détecter la nature de l’obésité.
Toutefois, le Dr Hansel insiste sur l’impossibilité d’extrapoler ces résultats à une population en bonne santé, plus jeune, et qui aurait un cœur et des artères sains. Lutter contre l’obésité et le surpoids reste donc une priorité pour prévenir les maladies cardiovasculaires.