De plus en plus, les vaccins attisent la peur, le scepticisme ou les doutes des populations à travers le monde. Le dernier numéro de la revue Vaccine revient, avec l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) en rédacteur invité, sur ce phénomène qui constitue un enjeu majeur de santé publique pour les Etats confrontés aux anti-vaccins.
Désinformation, complaisance, commodité
Dans ce numéro spécial, l’agence onusienne est ainsi invitée à s’exprimer sur ses recommandations pour mettre fin aux réticences d’une partie de la population mondiale. Mais l’OMS prévient d’emblée : « Il s’agit d’un problème complexe », qui ne saurait se résoudre par le biais d’une réponse unique. Car cette hésitation planétaire vis-à-vis des vaccins n’est pas homogène, elle dépend « des circonstances, du moment, du lieu et des vaccins en question », précise l’agence dans un communiqué.
Ainsi, « plusieurs facteurs entrent en jeu, dont la désinformation, la complaisance, la commodité et la confiance ». Les hésitations liées à l’innocuité des vaccins, souvent mises en avant en France, ne constituent « qu’un facteur parmi les autres », note l’agence, qui cite également les « croyances négatives basées sur des idées fausses » (telle l’idée selon laquelle la vaccination des femmes entraînerait la stérilité), mais aussi la méfiance envers les institutions sanitaires et les professionnels de santé, le rôle des leaders influents, ou encore le coût, les obstacles géographiques et la peur des aiguilles.
Tous ces facteurs jouent directement sur l’impact des campagnes nationales de vaccination, dans un monde où « un enfant sur cinq ne reçoit pas systématiquement les vaccins vitaux et, chaque année, 1,5 million d’enfants meurent de maladies que les vaccins existants permettraient d’éviter ».
Pauvres, riches, religieux, athées…
Pas de « recette miracle », donc, pour lutter contre ce phénomène – d’autant plus qu’il semble toucher toutes les classes sociales, tous les groupes religieux et tous les Etats. Contrairement à ce que l’on a tendance à penser, ces hésitations ne sont pas l’apanage des pays riches, trop gâtés par des années d’éradication de maladies contre lesquelles il existe un vaccin.
« Il est ressorti d’entrevues avec des responsables de la vaccinations dans les Régions de l’OMS que, dans certains cas, des minorités ethniques particulières en milieu rural et des communautés isolées étaient concernées, mais que des personnes aisées habitant en milieu urbain s’inquiétaient aussi de l’innocuité des vaccins. A certains endroits, ces préoccupations sont exprimées par des sous-groupes d’objecteurs religieux ou philosophiques », écrit encore l’OMS. Le niveau d’instruction d’un individu, par exemple, peut autant constituer un facteur favorisant la vaccination, qu’un obstacle à cette dernière.
La stratégie de l’OMS
Pour tenter d’apporter une réponse à ce phénomène, l’OMS préconise le dialogue avec les communautés, chose qui a cruellement fait défaut lors de l’épidémie d’Ebola. « Comme l’a tragiquement montré [cette] récente crise, il est essentiel de collaborer avec les communautés et de persuader les individus de changer d’habitudes et de comportements pour remporter des succès en santé publique ».
Ainsi, l’OMS propose d’intégrer les responsables religieux et autres leaders influents à la promotion du vaccin dans les communautés. Elle souhaite également utiliser les médias de masse pour prodiguer les messages sanitaires, mais aussi améliorer la commodité et l’accès aux vaccins dans les Etats. Sa stratégie pourrait enfin consister à rendre la vaccination obligatoire et à punir les anti-vaccins. Pour commencer, l’OMS va d’abord publier en septembre une note de synthèse sur l’atténuation de la douleur lors d’une piqûre, afin de rassurer ceux qui y verraient un obstacle à la vaccination.