Le CHU de Toulouse révolutionne la transplantation rénale. Des chirurgiens ont extrait et greffé un rein d’une donneuse vivante par voie vaginale assistés d’un robot chirurgical. Cette première mondiale constitue une avancée majeure vers une chirurgie moins invasive.
Pour ce faire, deux étapes ont été nécessaires. La première a eu lieu au mois de mai 2015 (1). Deux chirurgiens, les Drs Nicolas Doumerc, expert en chirurgie urologique robot-assistée, et Federico Sallusto, coordonnateur-responsable de la transmission rénale au CHU de Toulouse, ont réalisé une transplantation rénale robotique par voie vaginale sur une première patiente.
« Et puis on s’est dit pourquoi ne pas en faire bénéficier la donneuse ? », raconte à Pourquoidocteur le Dr Nicolas Doumerc. Le matin du 9 juillet dernier, l’équipe a alors prélevé puis transplanté un rein à l’aide d’un robot chirurgical par voie vaginale chez deux sœurs. « Une séquence tout robot unique au monde », se réjouit le spécialiste.
5 orifices de 8 millimètres
Tout comme la cœlioscopie traditionnelle, l’utilisation d’un robot chirurgical permet d’effectuer 5 petites incisions de moins d’un centimètre au niveau du ventre. Mais malgré l’utilisation de cette technique, ces interventions nécessitent une incision de la taille du rein (une douzaine de centimètres) au niveau du ventre. C’est pourquoi ces spécialistes ont pensé à prélever et introduire l’organe par le vagin.
« Lorsqu’on transplante un rein à un patient souffrant d’insuffisance rénale, nous n’enlevons pas les reins natifs. On place le greffon dans le petit bassin en fosse iliaque sur les vaisseaux iliaques (non loin de l’utérus et de la vessie, ndlr) donc on ne remonte pas jusqu’aux reins », indique le chirurgien.
Toutefois, passer par la voie vaginale présente plusieurs difficultés. La première concerne la taille de l’incision qui doit être adéquate à celle du rein. Grâce aux images du scanner, les chirurgiens ont pu mesurer très précisément qu’une incision de 8 centimètres suffirait pour faire passer le rein.
« La deuxième, c’est la contamination potentielle par des bactéries du vagin. Il ne fallait surtout pas que le rein entre en contact avec les parois vaginales, explique le Dr Nicolas Doumerc. Nous avons résolu ce problème, d’une part en plaçant le greffon dans un sac plastique, et d’autre part, en utilisant un écarteur en plastique avec du gel, ce qui nous a permis de diminuer les risques de traumatiser le greffon. »
Crédit : Hôpitaux de Toulouse. Dr Nicolas Doumerc (au fond) dirige à distance les instruments articulés du robot
Rétablissement rapide et moins douloureux
La donneuse a pu rentrer chez elle deux jours après l’intervention, et sa sœur, au bout de 4 jours d’hospitalisation. Plusieurs semaines après l’opération, les deux femmes vont très bien et ne portent pratiquement aucune cicatrice apparente. Outre une durée de séjour réduite et peu de cicatrices, l’utilisation du robot Da Vinci permet aussi un rétablissement plus rapide, atténuer les douleurs post-opératoires et le risque d’infection.
Dans le monde, une centaine de patients ont pu bénéficier de la chirurgie robotique dans le cadre de la transplantation rénale, essentiellement aux Etats-Unis, en Inde et en France depuis 2001 à l’hôpital Henri-Mondor à Créteil, puis au CHU de Tours douze ans plus tard.
Mais ce domaine de pointe n’est pas uniquement réservé à la greffe rénale. En octobre 2013, dans l’Hexagone, plus de 80 robots Da Vinci étaient en service, selon l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Principalement utilisé en urologie pour opérer des cancers de la prostate ou du rein, le robot sert également en chirurgie gynécologique ou même cardiaque. Au total, depuis 2011, plus de 17 000 interventions ont été réalisées.
(1) En mai, le Dr Nicolas Doumerc a été assisté par le Dr Mathieu Roumiguié, et en juillet par le Dr Jean-Baptiste Beauval.