« Un jour de fête pour les patients diabétiques et les diabétologues ». C’est en ces termes élogieux que le Dr Bruno Guerci, diabétologue à Nancy, a commenté pour le site médical FréquenceM la présentation ce jeudi des résultats de l’essai EMPA-REG au congrès annuel européen de diabétologie (Stockholm, 14-18 septembre).
L’étude, publiée simultanément dans le New England Journal of Medicine, pourrait faire date. Pour la première fois, elle démontre un effet bénéfique d’un anti-diabétique sur le système cardiovasculaire. L’empaglifozine réduirait de 30 % la mortalité chez les patients diabétiques de type 2 à haut risque cardiovasculaire.
7 020 patients suivis pendant 3 ans
Le retentissement cardiovasculaire du diabète n’est pas plus à démontrer. A long terme, les patients diabétiques peuvent en effet souffrir de complications (infarctus, AVC…), et ce, d’autant plus que leur glycémie est mal contrôlée. Pourtant, « intervenir sur le diabète n’avait pas, jusque-là, clairement montré un bénéfice sur les évènements cardiovasculaires », explique Samy Hadjadj, diabétologue à Poitiers.
L’étude EMPA-REG, menée sur plus de 7 000 patients atteints de diabète de type 2, était destinée à vérifier la sécurité de l’empaglifozine pour le cœur et les vaisseaux. Cette molécule appartient à la famille des inhibiteurs de SGLT2 (cotransporteur glucose-sodium) ; elle agit en augmentant l’élimination de sucre dans les urines.
Pour cet essai, les scientifiques ont comparé la survenue d’ événements cardiovasculaires, le nombre de décès, mais aussi les hospitalisations consécutives à un problème cardiaque ou vasculaire, chez des patients prenant un traitement standard pour le diabète (sulfamide, metformine) avec ou sans empaglifozine.
« Les évènements cardiovasculaires ont diminué de 14 % dans le groupe qui recevait cette molécule ; c’est un très bon résultat », commente Samy Hadjadj. Dans les faits, le nombre d’infarctus ou d’AVC n’est pas significativement plus petit, mais ce sont les décès de causes cardiovasculaires qui sont significativement moins nombreux dans le groupe traité.
Mais plus important, la molécule – administrée une fois par jour par voie orale – a également permis de réduire de 32 % la mortalité, toutes causes confondues : « Une puissance d’efficacité presque inattendue », pour Bruno Guerci. Les spécialistes soulignent cependant qu’il est maintenant important de comprendre les mécanismes qui expliquent comment l’empaglifozine parvient à réduire la mortalité.
En attente de remboursement
L’efficacité de l’empaglifozine avait déjà été démontrée précédemment pour réduire la glycémie, administrée seule ou en combinaison avec un traitement standard. La molécule dispose d'une autorisation de mise sur le marché européenne pour le traitement du diabète de type 2, depuis 2014. Cependant, en décembre dernier, la Commission de la transparence de la Haute Autorité de Santé, avait jugé le service médical rendu (SMR) de la molécule « modéré » à « insuffisant ». La Commission avait donc suggéré un remboursement, à 30 %, mais pour certaines indications seulement. Faute d'accord sur le prix avec le fabricant - les laboratoires Boehringer Ingelheim- l’empaglifozine n'est pour l'heure toujours pas commercialisée en France. Il en est de même pour la canagliflozine et la dapagliflozine, les deux autres inhibiteurs de SGLT2, produits par Jannsen-Cilag et Astrazeneca, respectivement.
En juin dernier, le Comité pour l'Evaluation des Risques en matière de Pharmacovigilance (PRAC) de l'Agence européenne des médicaments (EMA) a engagé une réévaluaton de l'ensemble des inhibiteurs de SGLT2, étant donné le risque d’acidocétose diabétique.