Douleurs chroniques et acouphènes n’ont a priori rien à voir. Pourtant, ces deux troubles se partagent une même place dans le cerveau. Ils empruntent les mêmes circuits et profitent d’altérations semblables dans la gestion des stimuli sensoriels. C’est ce que conclut une publication de Trends in Cognitive Sciences.
Un circuit similaire
Et si la dysfonction d’un système cognitif chargé de réguler les signaux sensoriels était à l’origine des douleurs chroniques comme des bourdonnements et autres symptômes des acouphènes ? Cette piste est évoquée pour la première fois en 2010. Grâce à de nombreuses techniques d’imagerie cérébrale, une équipe germano-américaine confirme maintenant que l’hypothèse est très sérieuse.
Pour appuyer leur propos, ils ont mesuré le volume de la matière grise dans le cerveau de différents patients, ainsi que leurs fonctions cérébrales.
Le même circuit cérébral est affecté par les acouphènes et la souffrance chronique, concluent les chercheurs. Il emprunte le cortex préfrontal ventromédian et le noyau accumbens, qui présentent alors des anomalies qui se chevauchent. Et toutes les zones touchées servent à évaluer et moduler les différentes expériences émotionnelles et sensorielles.
Deux neurotransmetteurs
« Ces aires agissent comme un système de garde des sensations perceptives, ce qui détermine la valeur affective des stimuli sensoriels – produits de manière externe ou interne – et module le flux d’information dans le cerveau, explique le Pr Josef Rauschecker, qui signe ces travaux. Acouphènes et douleurs chroniques surviennent quand ce système est compromis. »
Autre similitude : dans les acouphènes comme dans les douleurs chroniques, la dopamine et la sérotonine – deux neurotransmetteurs majeurs – contrôlent le processus. Or, endommager les circuits qu’ils empruntent perturbe la perception des signaux sensoriels… et peut créer un circuit en boucle.
« Mieux comprendre la maladie devrait permettre non seulement un traitement précoce, mais aussi des traitements individuels plus ciblés avec des traitements existants ou nouveaux, comme la thérapie dopaminergique », estime Markus Ploner, co-auteur de l’étude. Restent encore de nombreuses questions sur les interventions cliniques possibles, médicamenteuses ou non.