Entre les Français et les antibiotiques, c’est une histoire d’amour compliquée, à laquelle le gouvernement aimerait bien mettre un terme. Et pour cause : la surconsommation d’antibiotiques et la résistance accrue des bactéries qui en résulte constituent un enjeu de santé publique majeur, alors que les traitements échouent, de plus en plus, à soigner ces germes multirésistants.
Un rapport sur la question vient d’être remis au ministère de la Santé. « Les statistiques ne sont pas bonnes », a prévenu Marisol Touraine. Les années 2000 ont marqué un frein dans la consommation d’antibiotiques (-10,7 % entre 2000 et 2013), rythmées par des slogans accrocheurs (les antibiotiques, c’est pas automatique !) et des politiques volontaristes. Mais depuis 2010, les Français ont rechuté et la consommation est repartie à la hausse (+5,9 %).
125 millions de boîtes en ville
Qui dope donc ces statistiques ? En premier lieu, on note que l’usage d’antibiotiques est particulièrement élevé en médecine de ville (90 % de la consommation totale), bien plus qu’à l’hôpital (10 %), selon un rapport de l’Agence nationale du médicament (ANSM) daté de novembre 2014.
En 2013, les médecins de ville ont prescrit au total 125 millions de boîtes, soit 4 % de la consommation de médicaments en France. Le secteur hospitalier représente, quant à lui, 17,9 millions de boîtes vendues.
Pour autant, la ministre de la Santé a souhaité insister sur le fait que la surconsommation d’antibiotiques constitue un problème aussi bien à l’hôpital qu’en médecine de ville. De fait, « l’exposition aux antibiotiques est élevée à l’hôpital, où environ 4 patients sur 10 reçoivent, un jour donné, une dose », peut-on encore lire dans le rapport de l’ANSM.
Les femmes, grandes amatrices
Par ailleurs, les femmes semblent être plus enclines à user et abuser des antibiotiques que les hommes. Elles représentent ainsi 59,3 % des consommateurs d’antibiotiques, contre 40,7 % pour les hommes. Leur légère surreprésentation au sein de la population française (51,6 % selon l’Insee) ne suffit pas à expliquer cet écart de sept points.
Les infections urinaires telles que les cystites, beaucoup plus fréquentes chez les femmes que chez les hommes, constituent un facteur explicatif de cette différence. De plus, l’espérance de vie, plus élevée chez la gente féminine, pourrait induire un usage accru, étant donné que la consommation tend à augmenter avec l’âge.
Source : ANSM
Infections respiratoires en tête
Jouer sur les prescriptions pour limiter la consommation est l’un des objectifs du gouvernement. Au Royaume-Uni, un rapport public préconise même de punir les médecins qui auraient la main un peu lourde ! Les patients prennent trop d’antibiotiques, pour des pathologies qui n’en exigeraient pas nécessairement – notamment pour des maladies virales contre lesquelles ils sont parfaitement inefficaces.
En 2013, les affections des voies respiratoires étaient à l’origine de 7 prescriptions sur 10, selon l’ANSM. Les affections de l’appareil urinaire ainsi que les otites moyennes constituaient ensuite les motifs de prescription les plus fréquents. À l’exception de la grippe, les autres pathologies n’ont été que marginalement à l’origine de la prescription d’un antibiotique.
Source : ANSM