L’aspirine permettrait de prolonger la vie des patients atteints d’un cancer digestif (estomac, œsophage, foie, pancréas, côlon-rectum), révèle une étude présentée ce lundi au Congrès européen de cancérologie à Vienne (Autriche).
Jusqu’à maintenant, on savait que le bénéfice de l’aspirine était essentiellement préventif. De nombreuses études ont en effet montré qu’une prise quotidienne d’aspirine réduit le risque de cancer colorectal ainsi que les cancers digestifs. Ces récents travaux, menés par des chercheurs de l’Université de Leyde (Pays-Bas), sont les premiers à porter sur des patients souffrant de tumeurs localisées dans différentes parties du corps et à conclure sur une augmentation de l’espérance de vie.
Près de 14 000 patients suivis
Pour réaliser cette étude, les chercheurs hollandais ont suivi plus de 13 700 patients dont le cancer a été diagnostiqué entre 1998 et 2011. Les organes les plus touchés par les tumeurs étaient le côlon, le rectum et l’œsophage. En collectant les données de santé de ces participants, les scientifiques ont pu comparer les patients ayant reçu de l’aspirine et ceux qui n’en ont pas pris.
Au total, 30 % des patients ont consommé de l’aspirine avant que leur cancer soit diagnostiqué, plus de 8 % en ont utilisé après que le diagnostic a été posé et plus de 60 % n’en ont jamais pris.
Chez les patients atteints par un même cancer, ceux ayant pris de l’aspirine après leur diagnostic ont deux fois plus de chances de survivre que les autres. Selon les auteurs, l’effet bénéfique de l’aspirine serait lié à ses propriétés antiplaquettaires. En effet, ils supposent qu’en empêchant la formation de caillots, l’aspirine permet au système immunitaire d’éliminer les cellules tumorales circulantes dans les vaisseaux sanguins. Celles-ci utiliseraient les caillots de sang pour se cacher et échapper aux globules blancs.
Un bénéfice avec effets secondaires
« Les recherches médicales se concentrent de plus en plus sur la médecine personnalisée, relève le Dr Martine Frouws, co-responsable de ces travaux. Mais cette médecine coûte chère et est utile uniquement chez de petits groupes de patients. Nous pensons que notre travail montre justement le contraire. Il démontre le bénéfice considérable d’un médicament peu coûteux, bien connu et facile à obtenir pour un grand nombre de malades. »
Pour l’heure, la dose appropriée et optimale n’a pas encore été déterminée. La durée de prescription non plus. Un essai randomisé en double aveugle est d'ailleurs en cours pour examiner l'effet de la prise quotidienne de 80 mg d'aspirine sur la survie chez des patients âgés souffrant d'un cancer du côlon.
Cependant, cet anti-inflammatoire non stéroïdien n’est pas un produit anodin. Une prise régulière d’aspirine augmente le risque de survenue d’hémorragies digestives, d’ulcères ou d’anémies. Ainsi, des études plus longues seront nécessaires pour évaluer le bénéfice/risque pour les patients.