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Stimulation ovarienne

Cancer de l’ovaire : les femmes qui ont subi une FIV sont plus à risque

Par Suzanne Tellier

Les femmes qui ont subi une stimulation ovarienne seraient plus à risque de développer un cancer de l'ovaire, selon une étude qui ne se prononce pas sur le lien de cause à effet. 

DURAND FLORENCE/SIPA
Un léger sur-risque de cancer ovarien a été détecté chez des femmes ayant subi une FIV (386 cas entre 1991 et 2010), sans lien établi
Les praticiens estiment qu'au-delà de 7 ou 8 stimulations ovariennes, les risques sont plus élevés.
Mais dans les faits, les connaissances scientifiques ne permettent ni d'exclure ce risque, ni de l'établir.

C’est une question récurrente en consultation gynécologique. L’une des craintes les plus courantes chez les femmes qui subissent une fécondation in vitro (FIV). La stimulation ovarienne, qui initie le traitement, augmente-t-elle le risque de cancers des ovaires ? A cela, la science peine à apporter une réponse univoque.

Une nouvelle étude jette un pavé dans cette mare d’incertitudes. Présentée ce lundi au congrès de la Société Américaine de Médecine Reproductive, elle met en avant un léger sur-risque de cancers ovariens chez des femmes ayant subi une FIV – de l’ordre d’un tiers (37%).

255 000 patientes

Ces résultats, émanant de l’Université Collège de Londres, ont été obtenus à partir des données de 255 000 patientes suivies entre 1991 et 2010 au Royaume-Uni. C’est la plus grosse cohorte étudiée à ce jour : toutes les FIV réalisées au cours de cette période en Angleterre ont été passées en revue.

Au total, 386 cancers ovariens se sont déclarés chez ces patientes. Selon les auteurs, plus les femmes ont subi un traitement ovarien jeunes, plus le risque est élevé. Les trois années suivant la stimulation ovarienne seraient également les plus critiques.

Doutes

Pour autant, ces travaux ne se prononcent pas sur un lien de causalité. En effet, les scientifiques ne sont pas en mesure d’affirmer que le traitement ovarien, qui stimule la production d’estradiol et de progestérone, engendre ce sur-risque – mais ils ne l’excluent pas non plus. Le doute est d’autant plus fort que les femmes peuvent développer des pathologies sous-jacentes liées à leur infertilité.

« Le problème de ces études, c’est qu’elles ne précisent pas le nombre de traitements reçus par la patiente, le type, la dose…, explique le Dr François Olivennes, gynécologue-obstétricien au sein du centre parisien de FIV Eylau La Muette. On ne peut pas comparer des patientes traitées à fortes doses et de nombreuses fois, avec des patientes qui ont une prise en charge raisonnable ».

Ecoutez...
Dr François Olivennes, gynécologue-obstétricien : « Cette question, c’est le serpent de mer de la FIV. Aujourd’hui, aucune étude ne peut conclure indiscutablement à un risque lié aux traitements ovariens.»

Limite raisonnable

Sauf que cette prise en charge peut varier selon les pratiques professionnelles du médecin et la volonté du couple. Actuellement, l’Assurance Maladie rembourse à 100 % quatre tentatives de FIV, et quatre autres, si les premières ont abouti à un accouchement. « En fait, on ne sait pas quelle est la limite raisonnable, poursuit François Olivennes, On estime que huit cycles de traitement, c’est déjà beaucoup, notamment si la stimulation est forte. Mais en réalité, cela ne repose sur rien de scientifique ».

D’ailleurs, dans les faits, de nombreuses femmes ont recours à davantage de stimulations ovariennes que ce qui semble recommandé – et de nombreux centres le leur proposent. « J’ai lu certains papiers où les médecins expliquaient être allés jusqu’à 28 stimulations pour avoir un bébé !, souligne Samir Hamadah, chef de service du département de biologie de la reproduction au CHU de Montpellier. Il faut savoir dire stop. Parfois, lorsque les couples sont pris dans le circuit, ils ne savent plus s’arrêter. »

Les auteurs de ces travaux préconisent un dépistage systématique des risques de cancers ovariens avant d'entreprendre une FIV, ainsi qu'un suivi spécifique après le traitement. De fait, le cancer des ovaires est l'un des plus meurtriers en raison d'un diagnostic très tardif. Dans le doute, cette population de femmes pourrait faire l'objet d'une surveillance particulière.