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Méta-analyse de 53 études

Les régimes pauvres en graisses ne sont pas efficaces à long terme

Par Audrey Vaugrente

Inutile de faire l'impasse sur les lipides : ce régime restrictif est inefficace sur le long terme selon une méta-analyse. Mieux vaut privilégier une alimentation équilibrée.

OJO Images / Rex Featur/REX/SIPA

Mieux vaut éviter de se lancer dans un régime pauvre en graisses. A long terme, cette méthode ne s’avère pas plus efficace que les autres régimes. C’est ce que conclut une méta-analyse parue dans le Lancet Diabetes & Endocrinology. Contrairement à ce qu’on aurait pu penser, rien dans la littérature scientifique ne prouve que réduire au minimum sa consommation de lipides ait un intérêt. Pourquoidocteur décrypte la portée de ces résultats avec Marie-Françoise Rolland-Cachera, chercheur honoraire à l’Université Paris 13.

Un effet négatif sur le long terme ?

53 études, incluant un total de 68 000 adultes, ont été passées en revue. Tous ces essais randomisés ont comparé l’efficacité de plusieurs méthodes pour perdre du poids – dont un régime hypo-lipidique – pendant au moins un an. Ce suivi « à long terme » est important, car il permet d’évaluer l’impact de l’intervention sur une durée significative. Une méta-analyse est déjà parue en 2012 sur le même sujet. Mais elle s’est limitée aux essais cliniques de moins d’un an. Or, les résultats observés sur le court terme sont souvent à l’opposé de ceux observés à long terme.

Marie-Françoise Rolland-Cachera a publié une étude sur l’impact de la restriction en lipides chez l’enfant. Et selon elle, un parallèle peut être dressé avec les adultes. « Les enfants qui consommaient peu de lipides à l’âge de 2 ans devenaient plus gros mais seulement à partir de l’âge de 16 ans. Il fallait donc attendre 14 ans pour voir un effet délétère de la restriction des lipides au début de la vie, explique-t-elle. L’effet négatif apparaît donc bien des années plus tard. »

Des nutriments utiles

Jusque là, réduire la consommation de lipides pour perdre du poids semblait logique. Et pour cause : à masse similaire, ces nutriments apportent deux fois plus de calories que les glucides ou les protéines. Diminuer l’apport aurait donc dû entraîner une chute de l’IMC. Sauf que ce n’est pas le cas, du moins sur le long terme : par rapport aux régimes qui apportent plus de graisses – hypoglucidique ou Méditerranéen par exemple – l’amaigrissement est moindre de 1,15 kg en moyenne. Le résultat est d’autant plus paradoxal que les participants soumis au régime hypo-lipidique sont soumis à une intervention plus intensive.

Se priver semble donc assez peu productif. D’autant que chaque nutriment a son rôle à jouer dans l’organisme. « Si on diminue trop les acides gras, on retire des éléments importants au niveau de la synthèse des hormones, de la structure des membranes, en particulier des tissus nerveux, rappelle Marie-Françoise Rolland-Cachera, nutritionniste. Ils ont un rôle structurel très important, il faut donc éviter de trop les réduire. »

Cette chercheuse plaide pour la fin de la diabolisation des différents nutriments – souvent véhiculée par les régimes express, dont l’inefficacité est bien documentée. « Il est souvent évoqué que l’excès de lipides est délétère, ce qui en effet est probable si l’on dépasse les recommandations mais les restreindre trop peut aussi ne pas être souhaitable, souligne le Dr Rolland-Cachera. En fait, on arrive à une conclusion : manger trop de lipides, ce n’est pas bon, mais les restreindre trop non plus. »

Un seul constat s’impose face à de tels résultats : l’approche la plus efficace reste la « voie du milieu », une alimentation équilibrée. La perte de poids peut être plus lente, mais elle sera aussi plus durable.

 

Note : Les recherches de Marie-Françoise Rolland-Cachera sont résumées dans un eBook, accessible gratuitement : Role Of Nutrients In Promoting Adiposity Development. In ML Frelut (Ed), The ECOG eBook on Child and Adolescent Obesity (2015)