Dans les esprits, cette protéine est associée au cancer du sein, éventuellement à celui de l’ovaire. Mais BRCA1 est aussi impliquée dans la réparation de l’ADN. Ce rôle la lie aussi à la maladie d’Alzheimer. C’est ce que vient de mettre en évidence une équipe des Instituts Gladstone (San Francisco, Californie, Etats-Unis). Ses membres publient dans Nature Communications les résultats de recherches sur la souris et sur des cerveaux de personnes décédées.
Lorsque les cellules se divisent, la protéine BRCA1 se charge de réparer les dégâts infligés à l’ADN. Dans les neurones, ce processus ne survient pas. En revanche, les « cassures double-brin » se produisent après une activité cérébrale intense. C’est là qu’intervient BRCA1. Les auteurs de cette publication ont supposé que ce phénomène favorise l’apprentissage et la mémorisation. Un déséquilibre de l’expression de la protéine perturberait alors ces fonctions cognitives.
Sous exprimée de 65 à 75 %
Pour mettre à l’épreuve cette hypothèse, l’équipe a utilisé deux groupes de souris. Dans le premier, l’expression de BRCA1 dans les neurones a été réduite. Le second n'a fait l'objet d'aucune modification.
Placés dans un labyrinthe, les animaux ont dû nager pour s’échapper. En comparant la vitesse de nage et la capacité à trouver la sortie, les chercheurs ont pu observer une différence significative entre les deux groupes. Les souris produisant moins de BRCA1 ont démontré de moindre performances avec notamment des difficultés à mémoriser le chemin pour sortir du labyrinthe. La réduction du facteur BRCA1 conduit à l'accumulation des dégâts causés à l’ADN, ce qui favorise la destruction des neurones, et cause des troubles de l’apprentissage et de la mémoire.
Ces mêmes troubles apparaissent tôt dans la maladie d’Alzheimer. Les auteurs ont donc étudié des cerveaux de malades décédés, afin d’analyser le niveau de BRCA1 par rapport à des cerveaux normaux. Chez les personnes atteintes de la pathologie, la protéine est 65 à 75 % moins présente. Une altération qui avait déjà été observée dans une autre maladie neurodégénérative, la maladie de Huntington.
Manipuler en prévention
Pour mieux comprendre les liens entre Alzheimer et BRCA1, les scientifiques ont d’abord exposé des cellules en culture avec des protéines bêta-amyloïde. Résultat : elles réduisent le niveau de BRCA1, ce qui suggère leur rôle clé dans la réparation de l’ADN, et sa dysfonction chez les malades d’Alzheimer. Le même phénomène s’observe chez la souris.
L’équipe s’intéresse maintenant aux manières de lutter contre cette réduction des niveaux de BRCA1 dans le cerveau. « La manipulation thérapeutique des facteurs de réparation tels que BRCA1 pourrait, à terme, être utilisée en prévention des dommages neuronaux et du déclin cognitif chez des patients atteints de la maladie d’Alzheimer ou des personnes à risque de la développer, explique Lennart Mucke, directeur de l’Institut Gladstone pour les maladies neurologiques. En normalisant les niveaux ou la fonction de BRCA1, il serait possible de protéger les neurones des dégâts excessifs infligés à l’ADN et de prévenir les processus délétères que cela peut occasionner. »