« Deux verres maximum par jour pour les femmes, 3 pour les hommes et 4 en une seule occasion », connaître ces repères de consommation serait une façon d'aimer le vin. C'est en tout cas ce qu'affirme l'association Vin & Société dans sa dernière campagne « Le vin, je l'aime, je le respecte ». Les acteurs de la vigne et du vin en France affirment même « Aimer le vin, c'est aussi avoir un grain de raison ».
Sans doute le mot de trop pour la Haute Autorité de Santé (HAS), qui édicte les recommandations en matière de pratique médicale. L'instance a rappelé mardi que les seuils mentionnés sont ceux qui nécessitent de déclencher une intervention médicale. « Il ne s'agit en aucune façon de dire qu'en dessous de ces seuils de consommation à risque, la consommation serait normale, recommandée ou exempte de risque », précise-t-elle.
Dans un communiqué de presse, l'Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie (ANPAA) parle elle « du premier bras d'honneur du lobby de l'alcool à tous les défenseurs de la santé ».
Pousser à la consommation
Contacté par Pourquoidocteur, le Dr Alain Rigaud, président de l'ANPAA, estime que cette campagne est paradoxale. « D'un côté, on nous dit : "Je l'aime" et donc on fait la promotion du vin. Et, de l'autre, on l'emballe d'une précaution de prévention en nous disant "attention, il ne faut pas en boire trop" ». Ce chef du pôle d’addictologie de l'Etablissement Public de Santé Mentale (EPSM) de la Marne (51) soutient ainsi qu'il s'agit d'une « incitation déguisée » pour pousser les gens à la consommation d'alcool.
Des investissements massifs dans la pub
Avec cette campagne diffusée dans la presse papier, l'ANPAA déplore que le lobby du vin démontre une fois de plus « sa puissance de feu publicitaire avant même le démantèlement officiel de la loi Evin qu'il a obtenu dans le cadre de la loi Santé ». Pour l'association, cette publicité ravive la crainte d'un « déferlement publicitaire pour inciter les Français à consommer de l'alcool ».
Preuve de cette puissance de feu, le budget de cette campagne estimée à 600 000 euros, c'est-à-dire plus de 10 % du budget que l'Etat donne chaque année à l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (Inpes) pour ses campagnes de prévention sur l'alccol.
Et les premières victimes de ces investissements massifs pour les campagnes valorisant l'alcool pourraient malheureusement être les populations les plus vulnérables. D'ailleurs, celle de Vin & Société n'indique pas à qui ses seuils sont formellement interdits. C'est le cas notamment des femmes enceintes, des jeunes de moins de 25 ans, des personnes atteintes de maladies chroniques, des personnes âgées, ou encore des personnes prenant un traitement médical, a martelé la HAS.
A dose excessive, l’alcool contribue de façon directe ou indirecte à 14 % des décès masculins et 3 % des décès féminins. Il s’agit de la 2ème cause de mortalité prématurée en France.
Une campagne du lobby du #vin provoque un tollé du côté des acteurs de #santé à l'instar de la Haute Autorité de Santé...
Posté par Pourquoidocteur sur mercredi 9 décembre 2015