En cancérologie, le prix des nouveaux traitements se chiffre en dizaines de milliers d’euros. Leur efficacité est incontestable. Leur coût, en revanche, reste discutable. Ce 16 décembre, la Ligue contre le cancer a décidé de taper du poing sur la table. L’association réclame une fixation plus raisonnable des prix des anticancéreux. De grands noms de la médecine se sont succédé lors d’une conférence de presse pour véhiculer les propositions de la Ligue.
Un rapport de 1 à 100
Car en matière de fixation des prix des médicaments, le constat est simple. La valeur des médicaments ne correspond plus aux coûts de production, et le mécanisme manque cruellement de transparence. Les anticancéreux pèsent de plus en plus lourd dans le budget de la Sécurité sociale. En 2007, ils représentaient 6,6 % des dépenses ; en 2015, c’était 10 %.
La tendance est clairement au maintien de ces prix élevés. Le traitement du mélanome Keytruda, qui devrait prochainement arriver en France, représente 100 000 euros par an et par patient. La Haute Autorité de Santé (HAS) elle-même a souligné, en septembre dernier, son « impact significatif sur les dépenses de l’Assurance Maladie ».
Outre ces sommes élevées, les prix sont extrêmement volatils selon les pays. La Ligue prend pour exemple le sofosbuvir, traitement phare de l’hépatite C : il coûte 45 000 euros en France contre 750 euros en Egypte.
« On peut passer d’un rapport de 1 à 100 sans aucun problème, souligne le Pr Jean-Paul Vernant, onco-hématologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris). Le prix du Glivec, indiqué dans la leucémie myéloïde chronique coûte 95 000 dollars aux Etats-Unis en 2014. En France, il est de 40 000 dollars. L’Inde fabrique un générique très efficace qui coûte 2 000 à 3 000 dollars. »
Acheter ses médicaments en Suisse
La Ligue contre le cancer réclame donc plusieurs changements fondamentaux dans le mécanisme de fixation des prix, à commencer par un débat public sur l’accès aux médicaments innovants. La transparence est le maître mot de la campagne que mène l’association en faveur des patients. Transparence en terme de coûts – afin de comprendre le poids des essais, des échecs, du marketing – mais aussi en termes de marge bénéficiaire.
Dans ce domaine, la Ligue plaide en faveur d’une marge « honnête ». Elle demande qu’un générique soit disponible plus rapidement afin de faire jouer la concurrence, et réclame la création d’un observatoire de l’équité dans l’accès aux molécules innovantes. Car c’est là le nœud du problème posé par leur coût. « Il y a déjà des établissements de santé qui ne veulent plus avancer les médicaments car ils ne sont pas certains que les ARS les rembourseront. On dit à certains patients d’acheter leurs médicaments en Suisse », a précisé Claudine Esper, vice-présidente de la Ligue contre le cancer.
La pertinence est le deuxième mot clé de la campagne orchestrée par la Ligue contre le cancer. Elle concerne à la fois l’adaptation du prix des médicaments anticancéreux – au nombre de patients, de prescripteurs et à l’efficacité – et la prescription elle-même. Pour s’en assurer, l’association propose la mise en place de registres suivis par des instances indépendantes, mais aussi plus de représentation des usagers au sein du comité qui négocie le prix des médicaments avec les laboratoires.