Le 2 décembre dernier, l’ANSM a suspendu l’activité du laboratoire Stallergenes, qui produit des traitements de désensibilisation aux allergies. Ceux-ci sont associés depuis août à des erreurs de distribution.
Depuis, les patients allergiques s’inquiètent. Sur les réseaux sociaux, les réactions alarmées se sont multipliées. Pourtant, l’ANSM et les allergologues sont formels : il n’y a pour le moment aucune raison de paniquer, aucun danger pour la santé ou effet secondaire n’ayant été rapporté.
Pourquoi l’ANSM a t-elle pris cette décision ?
Le 13 août 2015, Stallergenes a changé son système informatique. La transition s’est mal passée et a eu pour conséquence de dérégler la chaine de distribution de certains traitements de fond contre les allergies, notamment les « Allergènes préparés pour un Seul Individu » (APSI), personnalisés pour chaque patient.
Certains d'entre-eux ont par exemple reçu des médicaments qui ne leur étaient pas destinés, le colis ayant été envoyé à la mauvaise adresse. D’autres ont reçu des flacons aux étiquettes incomplètes ou en anglais.
Plus grave, des patients,qui démarraient leur traitement, ont reçu des doses plus élevées que la dose initialelement prévue . En revanche, la composition des médicaments n’est pas remise en question, ceux ci ne présentent aucun caractère toxique.
Quelques personnes ont alors porté plainte à l’ANSM, qui à l’issu d’un contrôle en novembre, a prononcé l’interruption d’activité. L’Agence a aussi demandé aux patients de stopper leur traitement, et de retourner les lots.
« Les patients n’ont pas forcément compris. Ils ont trouvé qu’il était disproportionné d’arrêter les traitements de fond pour un bug informatique, et ont eu peur qu'on leur cache des choses, explique le Dr Isabelle Bossé, présidente du Syndicat Français des Allergologues. Mais il faut comprendre les autorités sanitaires. Même si le danger est proche de zéro, elles sont prudentes ».
Jusqu’à nouvel ordre, il est demandé aux médecins de ne pas initier de nouveaux traitements de fond, et de se concentrer plutôt sur des traitements d’entretien de type antihistaminiques ou médicaments contre l’asthme. Le laboratoire ALK, le seul autre producteur de ces produits en France, est déjà en flux tendu, depuis août, et risque la rupture de stock si les prescriptions devaient se reporter sur leurs médicaments.
Qui est concerné ?
Les médicaments mis en cause par l'ANSM sont les APSI Staloral, Alustal, et Phostal, délivrés depuis le 13 août 2015. Ils étaient utilisés pour désensibiliser les personnes souffrant d'allergies, aux acariens ou à certains pollens par exemple.
En revanche, les personnes allergiques au venin de guêpes et d’abeilles sont plus chanceuses : les spécialités pharmaceutiques Oralair ou Alyostal Venin qu'ils utilisent ne sont pas concernées.
« Les venins ne sont pas rappelés, nous allons pouvoir continuer la désensibilisation de ces patients, ce qui est une bonne nouvelle, car avec les températures très douces, les piqûres de guêpes peuvent toujours arriver », note Isabelle Bossé.
Par ailleurs, le test de diagnostic des allergies « Alyostal Prick » peut continuer à être utilisé sans aucun problème.
Quelles conséquences ?
Les traitements stoppés sur ordre de l’ANSM ne comportent à priori pas de risques pour la santé du patient, mais ont été retirés par mesure de précaution. La conséquence la plus importante est donc une perte de temps.
« Il ne faudrait pas que l’interruption dure trop longtemps. Deux ou trois mois ça va, on pourra rattraper le retard sur les traitements mais plus longtemps, c’est plus problématique, soupire le Dr Isabelle Bossé. On va devoir recommencer les traitements depuis le début. On fait perdre du temps à tout le monde et les patients perdent confiance en nous ».
Cette perte de confiance a déjà été importante car la communication a été mal gérée, selon plusieurs médecins. Au point que certains disent avoir été informés du problème par leurs patients. Une minorité a d'ailleurs même tenté de traduire leur médecin en justice.
Pourtant le Dr Bossé insiste, l’allergologue est sans responsabilité dans cette affaire. « Nous sommes victimes comme les patients. Mais nous sommes mobilisés, notre rôle est de tout faire pour rassurer », explique t-elle.
Pour les aider dans cette tâche, un numéro vert a été mis en place par l'ANSM. Il s'agit du 0800 130 000.