200 000 exemplaires vendus en quelques semaines, le guide des médicaments des Prs Even et Debré est incontestablement le succès d’édition de la rentrée. Mais ce coup médiatique prend aujourd’hui des allures de supercherie. Là où les auteurs affirment avoir signé un guide, la profession médicale parle, elle, de pamphlet. D’ailleurs, « la colère gronde dans le corps médical », observent Martine Perez et Damien Mascret dans le Figaro. Plusieurs sociétés savantes, indiquent les journalistes, ont porté plainte contre les auteurs auprès du conseil de l’Ordre des médecins en raison des propos diffamatoires. Traités, par exemple, de « charlatans » et de « gourous », les allergologues jugent les propos des deux médecins « irresponsables ».
Car au delà de l’outrance des attaques, c’est bien sur le fond que les représentants de toutes les disciplines médicales ou presque, contre-attaquent. « Ce livre est scandaleux et dangereux, confie au Figaro le Pr Michel Marre, président de la Société francophone du diabète. Il risque de provoquer des morts et repose sur des affirmations dénuées de preuve».
Même son de cloche dans les autres disciplines. « Le message de fond concernant le cholestérol et les maladies cardio-vasculaires est terriblement faux, relève le Pr Éric Brucker, endocrinologue (hôpital La Pitié-Salpêtrière). Le deuxième chapitre sur la face du bon et du mauvais cholestérol relève aussi d’un pamphlet publicitaire qui est terriblement dans l’à-peu-près, que l’on accepterait mal d’un étudiant en médecine ».
Manque de rigueur, approximations, contre-vérités, cette bataille médicale pourrait en rester là si les patients n’étaient pas pris en otage. Et sur ce point, les médecins en exercice redoutent que ce guide conduise à une perte de confiance des patients pour leurs médicaments. « Ce qui est dangereux dans ce livre, résume le Pr Dominique Marananchi, directeur de l’Agence du médicament (Ansm), c’est de faire peur à certains malades qui prennent des médicaments qui leur sont utiles ». « C’est d’ailleurs ce que nous observons sur le terrain », confirme au journal le Pr Jean-Louis Montastruc, professeur de pharmacologie médicale à Toulouse