Les carences en vitamine D sont largement répandues dans le monde. Manque d’exposition au soleil ou alimentation pauvre en produits laitiers et poissons gras sont les principaux responsables de cette hypovitaminose.
Celle-ci est associée à un défaut de minéralisation osseuse. Les os deviennent alors plus fragiles, ce qui augmente le risque de fracture. C’est ce qu’on appelle l’ostéomalacie. De nombreux travaux ont montré que ce trouble s’accompagnait d’une faiblesse musculaire. « Il a été ainsi suggéré une possible association entre le taux de vitamine D et les performances physiques et/ou les chutes », indique la Haute Autorité de Santé dans une note de janvier 2013.
De nombreuses sociétés savantes recommandent une supplémentation en vitamine D pour prévenir des chutes accidentelles chez la personne âgée, sans même prouver le déficit par un dosage. Or, des chercheurs suisses viennent de montrer que l’apport élevé de vitamine D ne présente aucun bénéfice et augmenterait même le risque de chutes chez les plus de 70 ans. Ils publient leurs travaux dans le JAMA Internal Medicine.
Un suivi d'un an
Pour arriver à cette conclusion inattendue, les chercheurs ont mené un essai clinique randomisé incluant 200 hommes et femmes. Parmi eux, près de 6 sur 10 étaient carencés en vitamine D.
De manière aléatoire, les chercheurs ont divisé les participants en 3 groupes : 67 personnes ont reçu une dose de 24 000 UI de vitamine D3 par mois (soit 800 UI par jour, la dose recommandée aux Etats-Unis. En France, elle est deux fois moindre), 67 personnes ont reçu une dose de 60 000 UI par mois et 66 autres ont pris une dose de 24 000 UI de vitamine D3 enrichie en calcifediol (un métabolite de cette vitamine assimilable plus efficacement pas l’organisme, ndlr). Tous ont suivi ce traitement durant 12 mois.
Au cours de l’étude, les chercheurs ont effectué des dosages sanguins afin de mesurer les taux de vitamine D et ont cherché à savoir si la condition physique des participants, notamment la marche, s’est améliorée.
Selon les résultats, les dosages les plus élevés sont ceux qui permettent de couvrir au mieux les besoins en vitamine D (seuil de 30 ng de vitamine D par millilitres de sang atteint). En revanche, elles n’apportent aucun bénéfice sur le plan physique. En effet, plus de 120 volontaires ont chuté une ou plusieurs fois au cours de l’expérience. Et parmi eux, la grande majorité appartenait aux groupes ayant reçu des doses très importantes.
Des recommandations non justifiées
« Comparé à la dose mensuelle recommandée de 24 000 UI, les posologies très élevées ne permettent pas de prévenir le déclin fonctionnel mais au contraire augmentent les chutes chez les personnes de plus de 70 ans, résument les auteurs de l’étude. En conséquence, les fortes doses ou la combinaison avec le calcifediol ne semblent pas être justifiées au regard des effets potentiellement délétères. Des travaux supplémentaires seront nécessaires pour confirmer ces résultats. »
Dans un commentaire accompagnant cette étude, le Pr Steven Cummings, spécialiste de l’ostéoporose, rappelle que « la stratégie de supplémentation en vitamine D pour atteindre le seuil de 30 ng/mL afin de réduire le risque de chutes et de fractures n’a jamais été établie par des essais cliniques randomisés », et d’ajouter qu’elle peut « très bien augmenter ce risque ». Le spécialiste préfère ainsi la prudence et conseille de suivre les recommandations actuelles et consommer des aliments naturellement riches en vitamines et minéraux.