Mieux vaut prévenir que guérir. A quelques jours de l’examen parlementaire du projet de loi « Pour une République Numérique », qui sera débattu à l’Assemblée nationale ce mardi 12 janvier, l’association A.N.P.A.A (Association Nationale de Prévention en Alcoologie et en Addictologie) sonne l’alarme. Objectif : prévenir les députés du risque sanitaire contenu dans ce texte, et les inciter à y remédier.
En effet, l’article 42 du projet de loi souhaite développer les compétitions de jeux vidéo, à l’issue desquelles d’importantes sommes d’argent peuvent être empochées par les gagnants. Le texte prévoit ainsi d’exempter ces compétitions des règles qui encadrent actuellement les jeux d’argent (poker, loterie…), et qui visent à prévenir les comportements addictifs.
Ces règles ont été fixées en 2010 lorsque le législateur a autorisé en France les jeux de hasard et d’argent. « C’était à la veille du mondial de football, se souvient Alain Rigaud, président de l’A.N.P.A.A. L’Etat savait que les paris en ligne seraient nombreux, il les a donc autorisés sur son territoire. Mais à l’époque, le législateur s’était armé de sagesse et avait été attentif aux risques sanitaires ! »
En effet, en 2010, l’autorisation a été assortie de règles strictes – contrôle de l’âge du joueur, plafonnement des pertes, repérage des sujets en difficulté… Par ailleurs, les entreprises proposant des jeux en ligne d’argent et de hasard doivent s’acquitter de taxes sur leurs gains, qui financent des dispositifs de prévention et de traitement des addictions aux jeux.
Les entreprises pourraient tricher
« La dimension financière de ces compétitions décuple les risques d’addiction. Il n’existe pas de protection absolue, mais compte tenu de ces risques, ces mesures de précaution s’imposent », martèle Alain Rigaud. En dispenser les compétitions de jeux vidéo serait ainsi une grave erreur.
D’autant plus que cette disposition législative pourrait ouvrir la porte à d’autres industries du jeu, craint l’association. Actuellement, les jeux vidéo répondent à une définition stricte, qui comprend notamment la notion de scénario. « Mais il suffit que certains jeux de hasard s’habillent d’un scénario pour se faire passer pour des jeux vidéo… et ainsi s’exempter des règles ».
Conscient de ce risque, le législateur précise dans le projet de loi « qu’une définition précise et un encadrement des compétitions restent nécessaires », et laisse au gouvernement le loin de prendre, par voie d’ordonnance, les mesures nécessaires. Les spécialistes de l’addiction, très prudents après la reculade du gouvernement et des députés sur la loi Evin, souhaitent ainsi leur administrer une piqûre de rappel.
« L'A.N.P.A.A, qui accueille et accompagne nombre de ces personnes devenues dépendantes aux jeux, demande que le gouvernement s'engage fermement et avec ténacité face aux lobbies économiques à préserver la jeunesse et la santé publique au moyen d'une forte régulation accompagnée des contrôles indispensables pour en assurer la pleine application », conclut l'association dans un communiqué.
@Pourquoidocteur Loi Evin, 25 ans. Alcool, tabac, jeux, nécessité de réguler! Pour une approche cohérente https://t.co/RkT7TMMwys
— Fédération Addiction (@FedeAddiction) 11 Janvier 2016