Malgré les désaccords profonds entre les députés et les sénateurs, la Commission mixte paritaire (CMP) a finalement adopté ce mardi un texte commun sur la nouvelle loi sur la fin de vie. La proposition des élus Alain Claeys (PS) et Jean Leonetti (LR) donnera ainsi lieu à un vote final des parlementaires le 27 janvier prochain. Voici les principaux points de cette nouvelle législation analysés par le Dr Vincent Morel, président du comité de pilotage du Plan ministériel 2015-2018 pour le développement des soins palliatifs et l’accompagnement en fin de vie.
Des directives anticipées contraignantes
Pour les directives anticipées par exemple, la personne pourra désormais stipuler son refus d'un acharnement thérapeutique. Elles s'imposeront aux médecins qui pourront seulement y déroger sous des conditions exceptionnelles : en cas d'urgence vitale ou si l'équipe médicale les juge manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale. Et même dans ces deux cas, ce n'est pas un médecin seul qui décidera, il y aura donc une procédure collégiale avant que les praticiens puissent s'y soustraire.
« C'est un grand pas pour les droits des patients, elles sont essentielles pour les rassurer. Aujourd'hui, on peut dire aux Français que s'ils écrivent correctement leurs directives anticipées elles seront appliquées. Les exceptions sont, elles, raisonnables », juge l'ancien president de la Société Française d'Accompagnement et de soins Palliatifs (SFAP).
Pour rappel, seuls 2 % des Français ont à l'heure actuelle écrit leurs directives anticipées.
Les traitements d'acharnement pourront être arrêtés
S'agissant de l'éternel débat sur le statut de l'hydratation et de la nutrition artificielle pour les personnes en fin de vie, il a été tranché par la CMP. Le texte commun adopté les considère maintenant comme des traitements, et non comme des soins. Mais pour Vincent Morel, le problème n'est pas ici.
« La question fondamentale est de savoir si dans une situation donnée, poursuivre ces traitements relève d'un acharnement thérapeutique refusé par le patient. Les clarification apportés sur ce point sont "importantes" », d'après le Dr Morel, « puisque ces traitements "peuvent" désormais être arrêtés (et non pas doivent être arrêtés) à la demande du patient où à la suite d'une décision médicale », ajoute-t-il.
Comme avec la loi Leonetti, ces situation se jugeront donc au cas par cas, c'est-à-dire qu'il appartiendra aux médecins et à la famille de définir ce qui rélève de l'obstination déraisonnable ou de l'acharnement thérapeutique, dans l'hypothèse où le malade ne s'est pas prononcé sur ces définitions.
La crainte d'une euthanasie déguisée s'éloigne
Enfin, la formulation initiale de la sédation profonde continue jusqu'au décès en fin de vie a été précisée, il s'agit maintenant d'« un droit de dormir avant de mourir pour ne pas souffrir ». « Elle répond davantage aux vraies situations cliniques », indique le Dr Vincent Morel. Ainsi, le législateur s'est voulu attentif au fait que cette demande ne peut avoir lieu que s'il y a le risque que le patient souffre, « en évitant quelque chose de l'ordre de la systématisation d'une sédation à la demande d'un patient », explique le Dr Morel. Les craintes d'une euthanasie déguisée semblent donc s'être dissipées...
Pour toutes ces raisons, Vincent Morel parle d'un texte « très équilibré qui répond pleinement aux craintes et aux questions que les Français nous avaient exprimé lors des débats publics qui se sont déroulés il y a quelques mois ».
Les parlementaires s'accordent sur le projet de loi #findevie : L'analyse du Dr Morel https://t.co/PbfSmggRTp pic.twitter.com/GAZHbuM8et
— Pourquoidocteur (@Pourquoidocteur) 21 Janvier 2016