Ils sont plus de quatre millions Français à souffrir de surdité, ou à avoir des problèmes d’audition. Dans le dernier numéro de sa revue Santé en action, l'Inpes présente le « baromètre santé sourds et malentendants » (1), la plus grande enquête menée en France sur leur comportement et leur état de santé. Un sombre bilan, car ces personnes souffrent souvent de stigmatisation et de problèmes pratiques au quotidien.
Pour ce baromètre, 2994 personnes sourdes et malentendantes ont été interrogées au cours de l’année 2011 et 2012 sur leur santé, notamment psychologique et sexuelle. Bien qu'il ne s'agisse que d'un échantilon de la population touchée par ce handicap, ce sondage permet de donner une idée des obstacles qu’il reste à surmonter.
Mal-être et suicide
Le baromètre confirme d’abord ce qu’une étude de l’INVS mettait déjà en évidence en décembre dernier. Les personnes sourdes sont trois fois plus nombreuses en état de souffrance psychique que le reste de la population.
Elles font en conséquence trois fois plus de tentatives de suicide que les personnes n’ayant aucun problème d’audition, et même lorsqu’elles ne passent pas à l’acte, elles sont cinq fois plus nombreuses à admettre avoir eu des pensées suicidaires au cours des douze mois écoulés.
Ces actes d’auto-agression interviennent notamment dans le contexte d’une souffrance au travail. Les sourds et malentendants sont 34 % à se dire en état de détresse psychologique contre 5,4% de la population générale. Ils sont aussi 3,5 % à avoir tenté un suicide pour raisons professionnelles, contre 0,6 % de leurs collègues.
Ce mal être s’explique par les difficultés de communication rencontrée au quotidien pour dialoguer avec leurs collègues ou pour comprendre les instructions. Seul un salarié sur dix bénéficie d’un emploi du temps aménagé.
Vie sexuelle
Il y a cependant un autre aspect de la santé des sourds et malentendants qui reste assez peu abordé : celui de la vie sexuelle. Les participants au baromètre ayant entre 15 et 29 ans ont été interrogés sur leur premier rapport. Près de 16 % d’entre eux expliquent ne pas avoir souhaité leur « première fois » .
Les femmes sourdes et malentendantes sont particulièrement touchées par le phénomène. Un quart d’entre elles dit ne pas avoir voulu son premier rapport, deux fois plus que les autres femmes.
En matière de contraception, ces femmes prennent aussi moins la pilule (moins d’une femme sur deux), mais sont plus nombreuses à déclarer un usage du préservatif (18,2%) ou une méthode « naturelle » (8,9%)
Face à ces situations compliquées, l’INPES souligne l’importance d’améliorer les dispositifs de prises en charge car par crainte de ne pas pouvoir communiquer avec les médecins un certain nombre de ces personnes renonce aux soins. La prise en charge psychologique doit en particulier être renforcée.
(1) Enquête menée par l'Inpes et la Caisse nationale de la solidarité pour l'autonomie