La photo du petit pied meurtri de Molly a fait le tour du monde. La petite fille de 5 mois a été victime du syndrome du tourniquet, aussi appelé "cheveu étrangleur". Des cheveux de sa maman se sont enroulés autour de l’un de ses orteils. Ce lien a alors agit comme un garrot et coupé la circulation sanguine. L’orteil de Molly a considérablement enflé et sa peau a été cisaillée.
Face à la douleur du nourrisson, la mère, infirmière, a très vite réagi et a libéré son orteil. L’accident aurait pu être très grave et conduire à la nécrose du membre, voire à son amputation.
Choqué, le père de Molly a voulu alerter les parents du monde entier. Il a donc posté une photo du pied de sa fille sur le réseau social Facebook. En moins d’un mois, plus de 32 000 personnes ont vu et partagé cette image.
Un syndrome rare et méconnu
Le syndrome du tourniquet est heureusement très rare. Il est aussi peu connu. Jusqu’en 2010, la littérature scientifique recensait essentiellement des études de cas. C’est pourquoi une équipe de pédiatres urgentistes de Toulouse a constitué la plus grande cohorte internationale d’enfants victimes du cheveu étrangleur.
Entre 2003 et 2009, le Dr Isabelle Claudet et ses collègues ont étudié 57 enfants admis aux urgences pédiatriques. « On recevait régulièrement des enfants présentant ce syndrome, on s’est donc demandé s’il était associé à un contexte particulier, explique à Pourquoidocteur la responsable des urgences pédiatriques du CHU de Toulouse. Dans un certain nombre de familles, nos assistantes sociales avaient mis en évidence qu’il existait des problèmes d’hygiène et des situations de précarité ».
En moyenne, les médecins recevaient 8 enfants par an âgés de moins de 6 mois. Les orteils étaient majoritairement atteints (95 % des cas) et le lien était souvent un cheveu. Mais certains enfants (fille et garçons) présentaient un cheveu enroulé autour des organes génitaux.
Accident ou maltraitance ?
L’étude souligne également que « dans les deux tiers des cas, les parents ne savaient pas depuis combien de temps le lien était en place », relèvent les auteurs dans leur étude publiée dans les Archives de Pédiatrie, avant d’ajouter qu’« aucun cas de nécrose n’est survenu et aucune amputation n’a été nécessaire ».
Mais cette proportion interpelle. Comment ne pas s’apercevoir de ces lésions chez des nourrissons ? « Dans ces familles, malheureusement, on ne change pas les enfant tous les jours. On ne vérifie pas minutieusement les petits orteils et les petits doigts des bébés », explique le Dr Claudet. Le manque d’hygiène et la précarité des familles expliquent donc cette découverte tardive.
La négligence des parents est également soulevée par les chercheurs. Avec un recul de 1 à 5 ans, les médecins ont observé qu’un tiers des enfants admis pour un syndrome de tourniquet était admis de nouveau pour un accident domestique comme une chute dans l’escalier ou du lit parental car l’enfant avait été laissé sans surveillance.
Selon la localisation des liens
Par ailleurs, si la plupart des cas semble d’origine accidentelle, certains éléments peuvent désigner un acte de maltraitance. « Cela dépend de la localisation. Si le lien est retrouvé au niveau des organes génitaux chez les moins de 2 ans alors cela ne peut pas être accidentel », affirme la pédiatre.
La spécialiste ajoute qu’au niveau des orteils, le syndrome du tourniquet est très souvent accidentel. « Mais lorsque vous observez que les liens ne sont pas des cheveux et que des nœuds différents sont présents sur plusieurs orteils, il faut tout de même se poser la question. Un petit enfant qui ne marche pas ne peut pas se faire des liens savamment réalisés à différents orteils », conclut-elle.