Souvent considérée comme peu hygiénique, la barbe a été remise au goût du jour par la mode « hipster ». Au delà du côté viril, des chercheurs montrent, dans une étude réalisée dans le cadre d'un documentaire de la BBC, qu'elle n'est pas si sale, et qu'elle constitue même une arme insolite contre l'antibiorésistance.
Au printemps dernier, un rapport de l'OMS alertait sur la propagation de bactéries multirésistantes, liée à un mauvais usage des antibiotiques. Afin d'éviter l’avènement d’une « ère post-antibiotiques », caractérisée par une mutation des souches de virus et une résistance croissante des bactéries aux traitements contre des maladies telles que les infections sanguines, la pneumonie ou la tuberculose, les scientifiques de l'OMS appelaient à des mesures urgentes.
Ils préconisaient notamment une meilleure sensibilisation des populations pour limiter toute surconsommation d'antibiotiques. Cependant, ces experts étaient loin d'imaginer que les hommes barbus pourraient aussi les aider dans leur lutte.
100 souches de bactéries
Dans l'étude, conduite par des chercheurs de l'université UCL, en Grande-Bretagne, des échantillons de barbe ont été prélevés sur le visage de 20 Londoniens. Ils ont ensuite été examiné en laboratoire, et 100 souches de bactéries ont été élevées, à partir de celles récoltées dans la barbe et les tissus de peau de ces hommes.
Bonne nouvelle : si une bactérie présente dans l'intestin, Barnesiella, a été retrouvée dans les échantillons, les chercheurs estiment qu'elle ne provient pas de matières fécales.
Certaines de ces bactéries ont ensuite été mises en contact avec d"autres souches de bactéries, résistantes aux antibiotiques. Les chercheurs ont alors eu la surprise de découvrir que certaines d'entre-elles parvenaient à tuer les bactéries résistantes. C'est notamment le cas de l'une d'elle, baptisée Staphylococcus epidermidis et capable d'éliminer une souche particulièrement résistante d'E Coli.
Les chercheurs ne sont pas encore capables d'expliquer ce phénomène. Toutefois, ils estiment que cette capacité est liée à des mutations génétiques : si certaines bactéries évoluent pour devenir résistantes aux antibiotiques, d'autres mutent pour produire des toxines capables de tuer les espèces résistantes aux médicaments.
« Dans un environnement compétitif comme la barbe, où un grand nombre de bactéries cohabitent, celles-ci se battent pour obtenir des ressources nutritives et de l'espace. Donc certaines mutent afin de lutter plus efficacement contre les autres », conclut le Dr Adam Robert, à l'origine de ces travaux.