Le cancer n’est pas qu’une maladie d’adulte. Chaque année en France, 1 700 nouveaux cas sont diagnostiqués chez l’enfant et 800 chez l’adolescent. Dans cette tranche d’âge, les leucémies, les tumeurs du système nerveux central et les lymphomes sont les principales pathologies rencontrées.
Et bien que 80 % des enfants sont encore vivants à 10 ans du diagnostic, deux-tiers souffriront de séquelles cardiaques, motrices ou neurologiques, rappellent les cancérologues pédiatriques à l’occasion de la Journée internationale du cancer de l’enfant.
Ces dégâts sont le résultat des traitements lourds qu’ils subissent. « Les parents, et même les professionnels de santé, pensent qu’on donne des doses beaucoup plus faibles de chimiothérapie aux enfants qu’aux adultes, alors qu’on donne des doses bien plus importantes », explique à Pourquoidocteur le Pr Pascal Chastagner, chef du service d’oncologie pédiatrique du CHRU de Nancy.
Si les médecins prescrivent de telles doses, c’est que les cancers pédiatriques sont très agressifs par rapport à ceux de l’adulte. Les enfants ont également un organisme en pleine croissance qui leur permet d’éliminer très rapidement ces médicaments. Mais à un âge où les connexions neuronales se forment, les traitements peuvent altérer le développement des enfants, notamment cérébral.
Des séquelles persistantes
Chez les petits patients atteints de leucémie aigüe lymphoblastique (LAL) – le cancer du sang le plus fréquent chez l’enfant-, des troubles de l’attention et de l’apprentissage apparaissent et persistent après l’arrêt des traitements, suggère une étude américaine parue la semaine dernière dans le Journal of Clinical Oncology.
Les chercheurs se sont particulièrement intéressés aux conséquences de la chimiothérapie prophylactique. Ce traitement est administré pour détruire les cellules cancéreuses qui s’accumulent dans le cerveau. « Il y a une vingtaine d’années, tous les enfants atteints de leucémie avaient une radiothérapie cérébrale prophylactique dont on sait qu’elle est néfaste du point de vue neuro-intellectuel, indique le Pr Chastagner, qui n’a pas participé à ces travaux. Aujourd’hui, on opte pour une injection de chimiothérapie dans les méninges, bien qu’elle soit elle aussi nocive ».
Durant 2 ans, les chercheurs américains ont suivi plus de 200 enfants et leurs parents. Les tests cognitifs révèlent des troubles de la concentration. De leur côté, les parents interrogés rapportent des difficultés d’apprentissage. Les scientifiques soulignent que ces troubles étaient plus prononcés chez les moins de 5 ans, et ceux ayant reçu des séances intensives de chimiothérapie.
Un suivi neurocognitif indispensable
« Puisque nous observons que ces troubles persistent deux ans après l’arrêt des traitement et qu’ils contribuent aux difficultés à l’école, alors notre objectif est d’intervenir précocement pour les limiter voire les prévenir », indique Lisa Jacola du département de psychologie de St Jude et auteur principal de l’étude. Et de poursuivre : « Ces résultats soulignent la nécessité d’inclure un suivi neurocognitif et scolaire dans la prise en charge de tous les enfants guéris d’une leucémie aigüe lymphoblastique ».
Dans les services français d’onco-pédiatrie, ce suivi spécifique est primordial. Durant les traitements, les enfants malades ont accès à l’école à l’hôpital comme à la maison, ils peuvent être accompagnés par un éducateur ou encore faire du sport. Tout est fait pour que la qualité de vie des patients puis des survivants soit la meilleure possible. Et cela fonctionne, des études, notamment françaises, montrent que les anciens malades du cancer ont de très bons résultats scolaires et et une insertion professionnelle réussie.