Chaque année, la surdité touche un enfant sur 1 000 en France. Dans une grande majorité, ils sont sourds de naissance pour des raisons génétiques (80 % des cas) ou suite à une infection virale lors de la grossesse. Lorsque la perte d’audition est légère ou modérée et qu’elle touche uniquement une oreille – ce qu’on appelle une surdité unilatérale -, un appareil d’amplification du son est suffisant. Mais pour les enfants atteints de surdité sévère voire profonde bilatérale, l’implant cochléaire est le seul moyen de sortir du silence.
En France, environ 7 000 enfants seraient implantés et près de 700 interventions sont réalisés chaque année. Pour les parents d’enfants sourds et pour les enfants eux-mêmes, l’implant cochléaire est un bouleversement. Les familles interrogées pour une enquête Ipsos réalisée pour la société MED-EL confient qu’une fois que leur enfant était candidat à la chirurgie de l’implant, ils étaient plus optimistes, combatifs et confiants. Et suite à l’opération, plus de 6 sur 10 estiment que ce dispositif a permis d’améliorer son bien-être et sa qualité de vie.
Un sentiment positif en partie dû aux avancées technologiques qui ont permis de repousser les limites de l’appareillage. « Les implants sont devenus beaucoup plus petits et les algorithmes de traitement du signal sont plus performants, explique à Pourquoidocteur le Pr Nathalie Loundon, chef de service ORL pédiatrique et de chirurgie cervico-faciale de l’hôpital Necker Enfants Malades (Paris). Aujourd'hui, on peut appareiller des enfants de 3 ou 4 mois atteints de différents degrés de surdité. »
Un diagnostic trop tardif
Mais encore faut-il que les enfants sourds soient diagnostiqués précocement. Ce sondage révèle que plus de la moitié des parents d’enfants de 0 à 12 ans ayant décelé une perte auditive ont attendu plusieurs semaines avant de consulter. Près de 15 % ont retardé la prise de rendez-vous durant un an.
Parmi ces patients qui tardent, certains expliquent ne pas avoir réalisé que l’audition de leur enfant se dégradait, d’autres estiment que le coût des appareils auditifs est trop important, ou avouent ne pas avoir voulu voir les signes. « L’idée d’avoir un enfant atteint de handicap est trop difficile pour certains parents. Dans l’histoire du parcours de soins de l’enfant sourd, on observe que certains ont du mal à venir consulter alors même que des dépistages ont mis en évidence une perte de l’audition », explique Nathalie Loundon. Résultat : l’âge moyen du diagnostic est de 16 mois.
Or, ce retard peut avoir de lourdes conséquences. Pour les enfants souffrant de surdité sévère, l’absence de prise en charge n’impactera pas uniquement le langage. Elle altère aussi leur développement affectif, relationnel, social et éventuellement cognitif sur le long terme. « Ce sont des enfants qui peuvent être très perturbés au niveau affectif. Ils peuvent être complètement en retrait, ou au contraire totalement agités, décrit la spécialiste. On voit bien que ce sont des enfants qui vont mal psychologiquement. »
Une perte de chance inacceptable pour les ORL qui se battent depuis des années pour un dépistage néonatal de la surdité dans les maternités. « La France a 10 ans de retard par rapport à ses voisins européens, déplore le Pr Loundon. La loi a été votée en 2012 et les fonds financiers en 2013 mais le dépistage se met doucement en place sur le territoire ». En Ile-de-France par exemple, 60 % des naissances en bénéficient. Un progrès qui ne doit pas s’arrêter là mais qui permet d’identifier les bébés atteints de surdité avant 6 mois.