Jusqu'en 2013, le virus Zika était vu comme un agent infectieux inoffensif. Mais la première flambée épidémique en Polynésie française a révélé sa facette la plus sombre.
Les autorités sanitaires de l'archipel ont rapporté une recrudescence inhabituelle du syndrome de Guillain-Barré : 42 personnes ont été victimes de cette complication neurologique, dont 16 hospitalisées en réanimation. « L’incidence du syndrome de Guillain-Barré a été 20 fois supérieur à ce qu’on pouvait attendre », relève le Dr Didier Musso, directeur du laboratoire de biologie de l'Institut Louis-Malardé à Papeete dans un article paru ce mardi dans The Lancet Infectious Diseases.
Ce syndrome neurologique est une complication post-infectieuse redoutée. Il s'agit d'une tétraplégie progressive partant des jambes et remontant jusqu'au cœur et les poumons. Il peut également toucher les nerfs faciaux. Dans la grande majorité des cas, cette paralysie est temporaire et réversible. Mais, elle peut également être fatale, comme en Colombie où 3 personnes y ont succombé.
Une hausse des cas de microcéphalie
Mais c'est au cours de cette dernière flambée de Zika que les risques pour les femmes enceintes ont été soulevés. Au moment où une explosion des cas est signalée au Brésil en décembre 2015, la Polynésie ressort les dossiers médicaux des personnes infectées. Ces investigations rétrospectives mettent en évidence une hausse des cas de microcéphalie entre 2013 et 2014. Au total, 18 enfants sont nés avec une malformation cérébrale, dont 10 ou 12 présentaient une microcéphalie.
« L’émergence du virus Zika aux Amériques en 2015 a été associée à une hausse dramatique des cas de microcéphalie. Comme pour le syndrome de Guillain-Barré en Polynésie française, la coïncidence temporelle suggère fortement que l’infection par le virus Zika au cours de la grossesse est responsable de ces dommages », écrit le Dr Didier Musso tout en précisant que la preuve doit encore être démontrée.
Tirer les leçons de cette épidémie
Aujourd’hui, la Polynésie française est débarrassée du virus Zika depuis le début du mois de février. Les autorités sanitaires affirment qu’une nouvelle résurgence de l’épidémie est très peu probable car la grande majorité de la population est immunisée. De fait, lors de l’épidémie de 2013-2014, « au moins 60 % » des 268 000 habitants ont été infectés par Zika.
Néanmoins, le moustique Aedes aegypti, vecteur de Zika, est toujours présent sur le territoire. Et il continue à faire régner la terreur en véhiculant le chikungunya ou la dengue.
Avec l’épidémie en Micronésie en 2007, la flambée en Polynésie est une importante source d’informations pour l’OMS et les pays actuellement touchés. Plusieurs travaux de recherche sont en cours pour approfondir les connaissances sur ce virus émergent et ses complications potentielles.