C’est le rendez-vous quinquennal qu’attendent tous les médecins libéraux. Ce mercredi à 14h30 a été donné le coup d’envoi des négociations conventionnelles entre l’Assurance Maladie et les syndicats médicaux.
Au cours de réunions hebdomadaires prévues jusqu’à la mi-avril, les organisations tenteront de maintenir un mot d'ordre : l'unité.
Dans une feuille de route commune publiée vendredi dernier, les cinq syndicats représentatifs (CSMF, FMF, SML, MG France, LE BLOC) se sont ainsi mis d'accord sur des sujets épineux. Une copie à faire pâlir d'inquiétude Nicolas Revel, le directeur général de la Cnamts (1). Lui répète depuis plusieurs mois que l’ONDAM (2) pour l'année 2016 a été fixé à un niveau historiquement bas de 1,75 %.
Plusieurs tarifs de consultation
Les syndicats plaident tout d’abord pour l’équité tarifaire entre généralistes et spécialistes. Le principe d’un tarif de base à 25 euros pour tous est désormais acquis.
Autre point de convergence, le récent congé maternité accordé par Marisol Touraine aux médecins ne pratiquant pas de dépassement d’honoraires (secteur 1). Les syndicalistes veulent son extension à toutes les femmes « quel que soit le secteur d’exercice ».
Ce programme commun de près de 10 pages souligne aussi la volonté des syndicats de faire valoriser, à l'avenir, des actes jusqu'à présent oubliés des revenus des libéraux, comme le conseil téléphonique ou les actes de télémédecine.
Enfin, la question épineuse des tarifs médicaux fait elle aussi son chemin. « Sur la nomenclature des actes, tous les syndicats sont désormais d’accord pour mettre fin au tarif unique », affirme Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF.
L'UNOF-CSMF, qui représente les généralistes de ce syndicat, a même fait une proposition s'agissant des consultations longues (ouverture d'un dossier médical, patients polypathologiques, visites à domicile, etc). Il veut fixer le tarif à 50 euros, soit le double d'une consultation classique de spécialiste.
Améliorer les conditions de travail
Au final, un seul bémol semble persister dans ce front commun syndical, toujours le même, le tarif de base d'une consultation simple. Sur ce point, chacun garde en effet sa position, elles vont de la CSMF avec 30 euros au SML et ses 48 euros !
Le président de la FMF, Jean-Paul Hamon, préfère lui insister sur ce qui rassemble, comme la volonté de créer ensemble un véritable « forfait structure » censé améliorer les conditions de travail du médecin libéral. Le syndicaliste estime l’enveloppe à 5 milliards d’euros, une somme colossale qu'il veut aller chercher dans les frais de gestion de l’Assurance Maladie, qu’il juge trop élevés, comme le soulignait aussi un récent rapport de la Cour des comptes.
Du côté de l'Assurance Maladie, Nicolas Revel n’a cessé de rappeler le contexte budgétaire morose de l’institution. Elle est, c'est vrai, en déficit chronique depuis 1988. Et en 2015, celui-ci s’est encore creusé. Il atteint désormais 7,4 milliards d'euros, selon la Commission des Comptes.
Dans ce contexte, le Dr Jean-Paul Hamon pense que cette dixième négociation conventionnelle sera « une course de fond », qui ne démarre pas « sous les meilleures auspices pour les syndicats », ajoute-t-il.
L’économiste de la santé Frédéric Bizard est lui plus optimiste. Contacté par Pourquoidocteur, il indique : « Lors d'une négociation conventionnelle, tout dépend de la vision stratégique des acteurs. L’Assurance maladie a une marge de manœuvre. Le contexte budgétaire n’excuse pas tout », martèle-t-il.
Dans une interview accordée au Figaro, Nicolas Revel convient qu'il dispose effectivement d'une certaine marge de manœuvre, mais il prévient : « Notre unité de valeur pour cette négociation, ce seront les millions d’euros et non pas les milliards ». Et à ceux qui proposent justement de prendre à l’hôpital pour redistribuer aux libéraux, il rétorque d'ores et déjà que « ce n’est pas aussi simple ».
L’auteur de l’ouvrage « Du syndicalisme à la convention », le Dr Patrick Carlioz, rappelle pour sa part les règles du jeu. « Pour qu'une convention médicale entre en vigueur, 3 des 5 syndicats représentatifs doivent la signer ». Et si tel n'est pas le cas, « c'est un règlement arbitral (ou minimum) fixé par l'Etat qui s'applique, afin que les médecins continuent à être remboursés sur le tarif de la précédente convention », conclut-il.
Des règles que les syndicats connaissent par cœur. Tous affirment qu’ils ne signeront pas un texte « a minima ». La date limite pour trouver un accord a été fixée au 26 août 2016.
(1) Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés
(2) Objectif national des dépenses d'assurance maladie