D’abord considéré comme un virus inoffensif, Zika est aujourd’hui accusé de provoquer le syndrome de Guillain-Barré, une complication neurologique post-infectieuse grave. Le lien a pour la première fois été évoqué en Polynésie française au cours de l’épidémie de 2013 lorsque les autorités ont rapporté une recrudescence inhabituelle de cette maladie.
Une hausse anormale est également observée en Amérique du Sud, victime d’une flambée de Zika sans précédent depuis bientôt un an. Malgré ces faisceaux de preuves, Zika n’a jamais été déclaré coupable. Mais ça ne saurait tarder.
Des chercheurs français (1) viennent de prouver que ce virus transmis par la piqûre d’un moustique peut causer l’apparition de ce syndrome. Ils publient leurs travaux ce mardi dans la revue The Lancet.
Sur l’archipel polynésien, qui compte à peine 270 000 habitants, environ 32 000 personnes auraient été infectées par le virus. Parmi elles, 42 malades ont développé ce syndrome entraînant une paralysie progressive, « soit une incidence multipliée par 17 », précise à Pourquoidocteur le Pr Arnaud Fontanet, directeur de l’unité d’épidémiologie des maladies émergentes à l’Institut Pasteur et auteur principal de l’étude.
La première preuve
Ces travaux s’appuient sur l’analyse d’échantillons sanguins des 42 patients. Les scientifiques ont recherché la présence d’anticorps dirigés spécifiquement contre le virus Zika. Cet élément de preuve est indispensable car un doute subsistait.
Lors de l’épidémie de Zika, la Polynésie française a dû également faire face à une épidémie de dengue. « Il y a 2 ans et demi nous pensions qu’une co-infection par le virus de la dengue et de Zika était à l’origine de ce syndrome de Guillain-Barré, explique le Dr Jean Neil, biologiste au département d’immunologie à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris) et auteur de l’étude. Il y aurait pu avoir des réactions croisées entre ces deux flavivirus ».
Mais les résultats montrent que la dengue n’est pas impliquée. « Parmi les 42 patients, 88 % ont présenté une semaine avant des signes d’infection aigüe par le virus Zika (fièvre, des éruptions cutanées, des conjonctivites et douleurs articulaires), résume le Pr Fontanet. En outre, en utilisant la technique la plus sensible et spécifique (qui ne réagit au le virus de la dengue, ndlr), nous avons retrouvé des anticorps dirigés contre Zika chez la totalité des patients ». Enfin, aucune infection récente par la dengue n’est trouvée chez ces malades.
Un mécanisme encore inconnu
Les scientifiques rapportent également que les formes cliniques sont inhabituelles et évoluent très rapidement. Parmi les 42 patients, 16 ont été admis en soins intensifs et 12 ont eu besoin d’une assistance respiratoire. Une hospitalisation en réanimation 4 jours après le début des symptômes neurologiques contre 1 à 2 semaines pour les syndromes « traditionnels ».
La récupération des malades a également été très rapide. Trois mois après la phase critique passée, près de 60 % des malades étaient capables de marcher sans assistance.
Ces différences ne sont pas encore expliquées par les chercheurs. Il leur reste encore à découvrir le mécanisme par lequel le virus Zika induit le syndrome de Guillain-Barré. Mais un pas de géant a été franchi : la preuve est faite, le virus Zika peut induire ce syndrome.
(1) Institut Louis Malardé (Papeete, Tahiti), Centre Hospitalier de Polynésie française (Papeete, Tahiti), Institut Pasteur (Paris), Hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Paris)
Pour la première fois, des chercheurs de l'Institut Pasteur montrent que le virus #Zika peut provoquer le syndrome de Guillain-Barré.
Posté par Pourquoi docteur sur mardi 1 mars 2016