Le glyphosate, pas si toxique ? La Ligue contre le Cancer n’y croit pas trop. Alors que la Commission Européenne s’apprête à renouveler pour 15 ans l’autorisation du principal composant du désherbant Roundup (Monsanto), qui arrive à expiration fin juin 2016, l’association de patients exhorte les pouvoirs publics à peser dans le débat.
En effet, les ministres Stéphane LeFoll et Ségolène Royal s’envoleront demain pour Bruxelles, où ils rencontreront le Commissaire européen à la Santé, Vytenis Andriukaitis, pour évoquer la question des pesticides. Leur rendez-vous se tient à quelques jours d’un vote décisif sur le glyphosate, dont l’avenir sera sellé le 7 et 8 mars prochain.
Polémique sur la toxicité
La Ligue s’associe donc aux ONG Générations Futures et foodwatch pour réclamer l’interdiction de cette substance en Europe. « Les ministres de l'Environnement et de l'Agriculture doivent peser sur le vote du comité d'experts des Etats membres », écrivent-ils dans un communiqué. La composition de ce comité reste secrète, au mépris de toute transparence démocratique.
Des craintes pèsent déjà sur l’issue du vote. De fait, le glyphosate est considéré comme probablement cancérogène chez l'homme par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), rattaché à l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Selon l’agence onusienne, il existerait un faisceau de preuves permettant d’établir un lien d’association entre l'exposition au glyphosate et le développement de cancers (lymphome non hodgkinien et cancer du poumon).
Or, « d'après des documents que foodwatch a pu se procurer, la Commission européenne propose d'ores et déjà un renouvellement du glyphosate », peut-on lire dans le communiqué. Cette position s’appuie notamment sur une évaluation menée par l’agence sanitaire allemande, la BfR, missionnée par la Commission et l’EFSA (l’Autorité européenne de sécurité des aliments) pour réévaluer la toxicité de la substance, et aboutissant à des conclusions opposées à celles du CIRC.
6 ONG portent plainte contre la BfR
« Les avis divergent et des doutes scientifiques persistent concernant le glyphosate », écrivent les auteurs du communiqué. Mais dans le doute – et si vraiment, le doute est permis – alors, les associations réclament la mise en pratique du principe de précaution, inscrit dans le règlement CE 178/2002 qui permet de protéger la population en cas d’incertitude sur la nocivité d'une substance. « Aujourd'hui en France, 10 000 tonnes de glyphosate sont utilisées chaque année », rappelle la Ligue.
De leur côté, six ONG environnementales (Global 2000, PAN Europe, PAN UK, Générations Futures, Nature et Progrès Belgique et wemove.fr) de cinq pays européens ont annoncé le dépôt d’une plainte contre la BfR, responsable de l’évaluation du glyphosate en Europe, pour « déni des effets cancérogènes du glyphosate ». Les structures dénoncent des « failles » et des biais dans les interprétations scientifiques de l’institut allemand.