100 milliards de neurones dans le cerveau. Mais seuls 30 sont impliqués dans la production d’ocytocine. Pour la première fois, des chercheurs ont mis en évidence le mécanisme qui permet d’émettre cette hormone qui module notamment la réponse à la douleur. Ce petit groupe de neurones est chargé de cette tâche colossale, expliquent-ils dans Neuron.
L’ocytocine est une hormone qui a de quoi laisser rêveur. Surnommée « l’hormone de l’amour », elle ne se cantonne pas à ce seul rôle… loin de là ! Elle est aussi impliquée dans la contraction de l’utérus au moment de l’accouchement, la régulation des interactions sociales, de la douleur… Mais jusqu’ici, le processus qui permettait de la produire était inconnu.
Endormir le signal
L’équipe dirigée par Alexandre Charlet, du CNRS, répond enfin à cette interrogation. Tout part d’une petite zone de l’hypothalamus où se serrent 30 « petits neurones ». Petits par leur taille, en comparaison avec le reste de la population neuronale du cerveau. Leur rôle, en revanche, est primordial car ils coordonnent à eux seuls la libération d’ocytocine.
Lorsque le corps est victime d’un choc ou d’une inflammation, cette information est acheminée jusqu’aux neurones de la moelle épinière via les nerfs périphériques. Le message y est interprété puis renvoyé vers d’autres neurones, dont ceux situés dans l’hypothalamus. « Leur première action est de contrôler la libération sanguine d’ocytocine », explique Alexandre Charlet, contacté par Pourquoidocteur. Un phénomène rendu possible par l’échange avec les « gros » neurones qui libèrent l’ocytocine dans le sang, permettant d’endormir le signal douloureux dans les neurones périphériques.
Une double action
Le second rôle des petits neurones est plus direct. « Ils projettent l’ocytocine dans les couches profondes de la moelle épinière pour inhiber la transmission du message nociceptif de la moelle vers le cerveau. On a une double action pour bloquer le message puis inhiber les neurones », résume Alexandre Charlet.
Face à une telle découverte, l’on pourrait s’enthousiasmer, et imaginer le développement de traitements des douleurs chroniques. Le chercheur français se montre un tantinet plus prudent. Pour le moment, ces travaux permettent surtout de mieux comprendre comment se comporte le système ocytocinergique. « La question qui était de savoir comment ce système agissait dans autant de régulations de manière aussi spécifique, explique-t-il. Si vous stimulez de manière grossière tout l’hypothalamus, beaucoup de choses vont se passer et rien de bien précis à la fois. L’identification de cette population apporte une première piste de réponse. »
Les recherches vont toutefois se poursuivre. L’équipe espère à présent comprendre comment se produisent et se régulent les émotions positives.