« On a l’impression d’être face à un mur », soupire Tania Silva depuis le Luxembourg. Infectée par la maladie de Lyme à l’âge de 5 ans, elle milite depuis octobre 2015 en faveur d’un meilleur diagnostic et d’une amélioration de la prise en charge. Cette jeune femme, présidente de Lyme Lux, tente aussi d’organiser la lutte associative. Car si la maladie transmise par la tique est encore largement ignorée, elle traverse bel et bien les frontières européennes.
Des tests peu fiables
« Au Luxembourg, seuls trois cas sont déclarés alors que 300 malades ont été diagnostiqués depuis trois ans », souligne Tania Silva, amère. Un fossé qui souligne le problème récurrent du sous-diagnostic. Cet écueil, de nombreuses associations le soulèvent et pas uniquement au Luxembourg. En France aussi où quelques 26 000 personnes seraient infectées par la borréliose de Lyme.
Le test de dépistage de référence (technique ELISA) est en cause. Selon le consensus de 2006, qui fixe les règles de prise en charge françaises, il doit être utilisé en première intention.« Selon une étude de l’Université Catholique de Strasbourg (Bas-Rhin), sa fiabilité est de 20 à 40 % », objecte Tania Silva. En cas de résultat positif, un second test, le Western Blot, confirme le diagnostic.
Ce protocole laisse à désirer car il laisse de côté tout un pan de la maladie : son aspect chronique. C'est ce que dénonçait en juin dernier le Pr Christian Perronne, chef du service Maladies infectieuses (Hôpital Raymond-Poincaré, Garches). Ce spécialiste de la borréliose est intervenu avec Tania Silva auprès du Parlement luxembourgeois. « Le protocole ne s’intéresse qu’aux formes précoces de la maladie. Il élude complètement les formes chroniques, expliquait-il à Pourquoidocteur. En termes de prévention et de prise en charge des formes précoces, il y a de bonnes choses. Le reste est totalement obsolète et il est urgent de revoir tout cela. »
Une maladie internationale
Les associations défendent un autre outil : le test de transformation des lymphocytes (LTT). Mais pour le passer, « il est très souvent nécessaire franchir la frontière allemande », explique Tania Silva. Nécessaire aussi de disposer d’une réserve d’argent, car le test coûte 150 euros et n’est pas remboursé. Un prix bien élevé mais qui s’accompagne d’une haute fiabilité : la marge d’erreur n’est que de 10 %. C’est ce diagnostic transfrontalier qui fait de la borréliose de Lyme une maladie internationale. Car outre-Rhin, l'infection est bien mieux prise en charge du fait de l'avance du pays.
Grâce à sa pétition, qui a recueilli 8 000 signatures, la Luxembourgeoise a pu défendre son dossier devant la Chambre des députés de son pays. Elle y a plaidé en faveur des nouveaux outils de dépistage, de la prévention, de la formation des médecins. Le public était peu réceptif. La présidente associative y voit un « manque de volonté politique ou de moyens. Il y a un problème de déni, et les patients en souffrent », déplore-t-elle.
La France, de son côté, semble plus ouverte aux revendications des associations. Reçues en juin 2015, elles ont obtenu une réévaluation des tests sérologiques.
Tania Silva ne compte pas s’arrêter là et veut porter la maladie de Lyme devant l’Europe. Pour cela, elle travaille en lien avec une association belge. « On a rendez-vous en avril à Bruxelles, et nous comptons bien exposer le problème, et obtenir des solutions », affirme-t-elle.