Toutes les hypercholestérolémies doivent déclencher un rééquilibrage de l’alimentation et de l’hygiène de vie, mais comme vient de le rappeler l'étude HOPE3, seules les hypercholestérolémies à risque tirent un bénéfice à être traitées par un médicament hypocholestérolémiant. Pourquoidocteur fait le point en s'appuyant sur un entretien avec le Pr Michel Krempf, endocrino-diabétologue au CHU de Nantes.
Un facteur de risque cardiovasculaire majeur
Les traitements contre le cholestérol ont été mis à l’index ces dernières années, parfois de façon très caricaturale. S’il n’est à l’évidence pas nécessaire de traiter toutes les hypercholestérolémies, et s’il y a probablement eu quelques excès, il convient cependant de revenir à certaines réalités.
Le cholestérol est un corps gras indispensable à la constitution des cellules et très présent dans le système nerveux. Il est à la fois fabriqué par l’organisme et apporté par l’alimentation, et c’est là que le bât blesse.
L’étude des populations primitives en insécurité alimentaire a bien montré que lorsqu’elles accédaient à une alimentation de type occidental, c’est-à-dire riche en calories et en graisses animales, le taux de cholestérol dans le sang avait tendance à s’élever et les maladies cardiovasculaires à apparaître.
Un rétrécissement de la lumière des artères
Cette augmentation du risque cardiovasculaire parallèlement au taux de cholestérol dans le sang s’explique par le fait que les cellules du corps ne prennent que la quantité de cholestérol dont elles ont besoin : quand leurs apports sont satisfaits, elles laissent le cholestérol dont elles n’ont pas besoin dans la circulation sanguine.
Si ce cholestérol inutile est durablement en excès dans le sang, il va avoir tendance à y former des agrégats et à se déposer dans la paroi des artères, exactement comme le calcaire se dépose sur les parois d’une canalisation lorsque l’eau est trop riche en calcaire.
Chez l’homme, l’athérosclérose correspond à cet « entartrage » des artères : les plaques d’athérome rétrécissent progressivement la lumière des artères et aboutissent à leur occlusion, celle-ci pouvant être brutale (« infarctus du myocarde »).
Traiter seulement quand il y a un risque
Parmi les facteurs de risque d’accident cardiovasculaire, le cholestérol est un facteur très « rentable » à traiter car, du fait de la présence d’un « noyau de cholestérol » dans la plaque d’athérome, un traitement par un anti-cholestérol fait rapidement diminuer le volume de cette plaque, agrandit la lumière de l’artère et améliore le flux sanguin.
Pourtant toutes les hypercholestérolémies ne sont pas à traiter, et en particulier surtout pas les formes secondaires (hypothyroïdie, maladies du foie, insuffisance rénale…), qu’il faut éliminer auparavant. Par contre, toutes les hypercholestérolémies doivent bénéficier d’une rééquilibration de l’alimentation, au détriment des graisses animales, et d’un développement de l’activité physique. Par ailleurs, un tabagisme éventuel doit être interrompu et un surpoids doit être corrigé.
Les hypercholestérolémies qui sont à traiter avec un médicament sont donc uniquement celles qui résistent au rééquilibrage du régime et s’accompagnent d’un risque cardiovasculaire avéré. Or, la définition de l’hypercholestérolémie à risque fait toute la polémique actuelle. Le nombre de malades à traiter va, en effet, varier très largement en fonction des critères de gravité qui seront pris en compte et c'est la que l'étude HOPE-3 efface certaines zones d'ombre.
Un score de risque total validé
Beaucoup de discussions existent mais il y a cependant consensus sur les critères de risque qui font grimper le score de risque cardiovasculaire total et celui-ci est déterminé par une formule qui pondère l’importance des facteurs de risque.
Cette pondération a été établie 2 grandes études : l’étude de Framingham et l’étude européenne SCORE. La formule du calcul du risque total combine plusieurs facteurs de risque (cholestérol, hypertension artérielle, tabagisme, sexe masculin, diabète...) et aboutit à un score élevé, soit parce que le taux de mauvais cholestérol est très élevé (comme dans les hypercholestérolémie familiale), soit parce qu’il y a des antécédents d’accident vasculaire (infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral…), soit parce qu’il y a une association à d’autres facteurs de risque, et en particulier le diabète.
Dans le cas du diabète associé, les données scientifiques démontrant le bénéfice majeur d’un hypocholestérolémiant sur le risque de maladie cardiovasculaires et de décès précoce sont sans aucune équivoque.
En l'absence de diabète, la remarquable étude HOPE-3 sur plus de 12 000 personnes, avec un score de risque cardiovasculaire intermédiaire (5% à 5 ans), montre que chez des hommes de plus de 55 ans et des femmes de plus de 60 ans en léger surpoids et avec une tension artérielle limite, une dose modérée de statine réduit le risque d'accident cardiovasculaire de 25%. Cette réduction est très importante et elle est obtenue pour une tolérance correcte et dans une étude de bonne qualité scientifique (plus de 12 000 personnes traitées 5,6 ans).
HOPE veut dire "espoir" en anglais, et très clairement, cet espoir dans l'hypercholestérolémie est apporté par une approche basée sur le calcul du risque cardiovasculaire absolu, et y compris chez les personnes qui on un score de risque modéré.