« Soyez plus fort que le diabète ! » s’exclame ce 7 avril l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS). Cette maladie chronique, qui touche 350 millions de personnes dans le monde, est désignée comme la thématique de cette journée mondiale de la santé.
Au cours de l’année, les journées dédiées à une pathologie ou à la lutte contre un comportement peu sain reviennent très régulièrement dans l’actualité. Au calendrier, plus de 200 dates sont consacrées à la santé. Presque chaque semaine, Pourquoidocteur consacre un titre à une journée mondiale : don d’organes, hépatite, tabagisme... Mais ces événements ont-ils une réel impact ?
Sortir l’endométriose de l’ombre
En France, la prise de conscience autour de l’endométriose date de 2013. C’est le 13 mars qu’est fixée la journée mondiale associée à cette maladie gynécologique. Les campagnes ont été propulsées par la spécialiste Chrysoula Zacharopoulou, de l’hôpital Armand-Trousseau (Paris). En trois ans d’actions régulières, notamment dans le cadre de la semaine européenne, cette chirurgienne a vu la mobilisation se démultiplier. « Cette année était importante car il y a eu une forte exposition médiatique et de nombreuses initiatives associatives », explique-t-elle. Un réel progrès pour une maladie qui était jusqu’ici restée dans l’ombre.
Dans le cas de l’endométriose, la journée mondiale est couronnée de succès. Désormais, les actions se multiplient en dehors de ce cadre. Une convention a été signée avec le ministère de l’Education nationale, afin de former les infirmières scolaires à cette problématique.
Mais se limiter à ces événements ponctuels ne suffit pas pour parvenir à de bons résultats, souligne Chrysoula Zacharopoulou : « pour avoir un impact, une campagne doit s’opérer sur le long terme, et multiplier les actions. »
Un pic médiatique
Les journées mondiales ont quand même l’intérêt de provoquer un pic dans la couverture médiatique, comme pour l’endométriose. Des chercheurs de l’Université d’Etat de San Diego (Californie, Etats-Unis) se sont penchés sur l’impact de la journée sans tabac en Amérique latine et son équivalent national aux Etats-Unis, le Great American Smokeout. Les résultats sont édifiants : sur le continent sud-américain, les médias sont 71 % plus présents qu’à l’ordinaire sur le sujets – une progression qui va jusqu’à 83 % au Venezuela. Les requêtes Internet connaissent elles aussi un boom.
L’analyse des données aux Etats-Unis révèle des comportements encore plus précis. Le Great American Smokeout occasionne une hausse de 61 % de la couverture médiatique, de 13 % des mentions sur Twitter. Les consultations sur la page Wikipédia sont également plus nombreuses. Au total, les chercheurs ont noté 61 000 requêtes et appels aux hotlines de soutien. Pour améliorer encore l’impact de telles campagnes, l’auteur suggère de s’assurer qu’elles soient menées en dehors des dates de vacances, afin d’atteindre « une audience plus réceptive ».
Activisme paresseux
Ces stratégies ont toutes les chances d’atteindre leurs cibles, si elles sont bien menées. En effet, elles encouragent la population à reconnaître ce qui relève du sain et du moins sain, à en établir la norme, ce qui encourage une modification du comportement dans le sens le plus favorable à la santé. Le réseau social de l’individu peut aussi intervenir dans ce phénomène, selon une revue d'études parue dans le Lancet. Les chances de succès sont accrues si les campagnes médiatiques se multiplient, comme le suggère Chrysoula Zacharopoulou, et qu’elles visent une cible épisodique, comme la vaccination ou le dépistage.
Mais les journées mondiales peuvent aussi avoir un effet pervers, et inattendu. Des travaux ont en effet montré, à travers une série de 5 études en laboratoire et sur le terrain, que les personnes qui s’engagent pour une cause de manière minime mais publique vont moins souvent poursuivre avec des actions plus significatives. Ils se servent de ce premier acte comme d’un gage. C’est ce qu’on appelle le slacktivisme, ou l’activisme paresseux. L’exemple parfait consiste à « liker » une page Facebook ou arborer un emblème sans donner d’argent ou agir de manière concrète. Ce sont les activistes discrets, ou qui se sentent impliqués personnellement, qui auront plus tendance à approfondir leur engagement dans les faits.