Les programmes nationaux incitant la population à bouger plus et manger plus sain seraient inefficaces lorsqu’ils s’appuient sur la motivation personnelle, selon une étude britannique de l’université de Cambridge et présentée dans le journal Plos Medicine.
En revanche, les interventions limitant le choix nutritionnel en régulant, par exemple, la vente d’aliments trop gras, trop salés et trop sucrés dans les magasins permettrait d’atteindre les objectifs fixés.
De nombreux pays se sont dotés de ces programmes afin d’améliorer l’alimentation de leur population et combattre l’épidémie d’obésité. En France, l’Etat a lancé en 2001 le Programme National Nutrition Santé (PNNS). Grâce aux messages de sensibilisation diffusés à la télévision, et les différents outils d’éducation délivrés à la population et aux médecins, le PNNS a permis de réduire la prévalence du surpoids et de l’obésité chez l’enfant. La consommation de sel et sucre des Français a également diminué au cours de ces 15 dernières années tandis que la consommation de fruits et légumes a grimpé.
Pour autant, ces améliorations n’ont pas concerné toute la population. « Les inégalités sociales de santé se sont creusées dans le domaine de la nutrition », reconnaît le comité de pilotage du programme aussi appelé « Manger, Bouger ». Un constat établi également par nos voisins britanniques et américains.
Persistance des inégalités
« Le postulat de ces programmes est que les conseils, les directives et les messages d’encouragement changeront les comportements alimentaires et augmenteront l’activité physique de la population, expliquent les auteurs. Nous avons donc cherché à savoir pourquoi cela ne fonctionne pas et pourquoi ces stratégies n’ont pas réduit les inégalités d’accès à une alimentation saine et équilibrée. »
Selon leur analyse, ces interventions de santé publique peuvent utiliser deux types d’approche. La première est axée sur la santé de toute la population et vise à obtenir des améliorations modestes chez chaque individu. La seconde tente au contraire de sensibiliser les personnes à risque, par exemple les diabétiques, et améliorer l’état de santé d’un petit nombre de personnes.
Pour les chercheurs, l’approche populationnelle n'atteint pas tous les individus de la même manière. En effet, si le programme incite à cuisiner des produits frais chez soi pour remplacer les plats préparés, seules les personnes ayant les moyens financiers ou le temps de cuisiner pourront atteindre cet objectif.
Limiter l'accès aux aliments malsains
Les auteurs donnent l’exemple de la supplémentation en acide folique, vivement recommandée aux femmes enceintes. Si ces dernières ne s’y intéressent pas, ne comprennent pas l’importance de cet élément pour leur bébé ou ne peuvent pas acheter ces compléments alimentaires, alors la promotion de l’acide folique est vaine.
A l’inverse, si les toutes les farines vendues dans le commerce étaient enrichies en acide folique, cette intervention serait plus efficace et équitable dans la population générale, estiment-ils.
Les spécilaistes reconnaissent toutefois que cette approche peut être considérée comme une privation de liberté de choix. Mais ils soulignent que ces mesures sont déjà prises dans certains pays et s’avèrent efficaces et simples à appliquer.
Interrogée par MedPage Today, le Pr Jean Adams indique qu’au Mexique la taxe sur les boissons sucrées a permis de réduire de 10 % les ventes. Une mesure à laquelle réfléchit la Grande-Bretagne. Autre modèle à suivre : l’Ecosse qui a interdit les ventes promotionnelles sur les boissons sucrées et également exigé qu'elles ne représentent que 30 % des boissons rangées dans les rayons.
Mais tout cela nécessite un courage politique, relève la responsable des travaux. Pour les mettre en place, les gouvernements font face à une pression du public mais surtout commerciale des grandes entreprises agroalimentaires. Un lobby qui ralentit le développement et l’exécution des ces interventions.