Discorde, crises, pression… Le service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire du CHRU de Besançon est en proie à « une situation explosive », selon le Pr Sydney Chocron, son chef du service.
Interrogé par le quotidien l’Est Républicain, le chirurgien cardiaque dénonce de vives tensions au sein de son service qui menacent la vie des patients. « Le bien-être des malades est ma priorité absolue mais, vu l’état actuel des tensions au niveau du bloc opératoire, je ne peux plus garantir la qualité des soins des patients opérés du cœur au CHRU. C’est très grave, ces tensions sont le terreau d’une hausse de la mortalité », a-t-il confié à nos confrères.
Le chirurgien décrit une opposition entre les médecins et le personnel paramédical. A nos confrères de la radio France Bleu Besançon, il raconte « l’ambiance délétère » lors des interventions. La chirurgie du cœur est une opération lourde et délicate qui requière une équipe soudée. Alors quand 8 personnes réunies dans une même pièce pendant plus de 4 heures se « regardent en chiens de faïence, ils ne communiquent plus, et ce manque de communication est une perte de chances pour les patients ». Toutes les conditions sont réunies pour que des « mots malheureux » soient prononcés. « Mais ce ne sont pas les gens qui sont en cause, c’est le système », juge-t-il.
« Un déficit chronique de personnel »
Le Pr Chocron explique que depuis qu’il a pris la direction du service, il y a 9 ans, le nombre d’interventions à cœur ouvert est passé de 550 à 750, « et à effectif quasi constant ». « Un déficit chronique de personnel soignant, infirmières et aides-soignants » qui expliquerait ce contexte de crise, mais en partie seulement.
Le Pr Chocron estime en effet que la direction a une part de responsabilité. Dans les colonnes de l’Est Républicain, il explique que la directrice générale du CHRU, Chantal Carroger, « a réuni le personnel soignant du service sans les médecins » après avoir été alerté du malaise ambiant dans le service. Une trentaine de personnes, sur un service qui en compte 90, ont participé à cette réunion au cours de laquelle « des mesures contre les médecins » auraient été prises. « Elle est parvenue à monter des gens les uns contre les autres, d’où la situation explosive au bloc qui me fait peur. Ce qui se passe n’est la faute ni des médecins ni des infirmières mais est dû à de mauvaises conditions de travail structurelles. Le service compte des infirmières, des aides-soignantes et ASH extraordinaires », affirme Sydney Chocron.
Stress et manque de communication
La direction de l’hôpital, que nous avons sollicité et qui n’a pu « répondre favorablement à notre demande » d’entretien, reconnaît dans un communiqué de presse avoir eu connaissance d’une « succession de faits témoignant d’une souffrance au travail chez les personnels médecins et non médecins du service, signalée par l’inspection du travail et le médecin du travail de l’hôpital ». Une situation qui « a conduit la direction générale, en concertation avec les responsables médicaux de l’établissement, à rencontrer les équipes paramédicales, après en avoir informé le chef de service ».
A l’issue de cette réunion, la direction dit avoir constaté « une programmation insuffisante au bloc opératoire entraînant un stress du personnel, un manque de communication au sein des équipes et des signalements de comportements individuels inappropriés ». Un groupe de travail destiné à mettre en place une nouvelle organisation au bloc opératoire et « des formations sur la collaboration en équipes et la bientraitance en travail » devraient être mises en œuvre. La direction devrait à nouveau rencontrer les équipes du service en juin prochain.