Couleur rose et poupées pour les filles, bleu et jeux de construction pour les garçons. Les stéréotypes qui s’appliquent aux jeunes enfants leur laissent quelques années de répit, pourrait-on croire. Le sexe des nourrissons influence pourtant nos réactions à leurs pleurs, et cela dès trois mois, révèle une étude internationale à laquelle a participé l’université de Lyon/Saint-Etienne.
Les chercheurs, qui publient leurs résultats dans le journal BMC Psychology, sont parvenus à montrer que les adultes associent de manière erronée la hauteur de la voix au genre du bébé. Les filles sont ainsi censées pleurer de manière plus aigüe. Les hommes ont aussi tendance à moins bien supporter les pleurs de garçons que les pleurs de filles, « sans doute à cause du stéréotype bien enraciné selon lequel les garçons sont censés crier plus grave », estiment les auteurs.
« Cette découverte, que les hommes pensent que les garçons souffrent plus que les filles avec la même hauteur de cris, pourrait indiquer que ce genre de stéréotype sexuel est plus ancré chez les hommes, explique le Dr David Reby du département de psychologie de l’université du Sussex (Royaume-Uni). Cela pourrait avoir des implications directes sur le bien-être des bébés : les cris d’une petite fille pourraient être négligés par rapport à ceux d’un garçon, s’ils ont le même timbre de voix. »
Crie "efféminé" ... à 3 mois !
Outre ces réactions injustifiées mais quelque peu instinctives, l’étude a fourni un résultat plus surprenant. Une fois qu’ils connaissent le sexe des bébés, hommes et femmes leur distribueraient des attributs de virilité et de féminité en fonction de la tonalité des pleurs. Un garçon aux pleurs aigus serait ainsi un peu efféminé (même à trois mois !), et vice-versa.
« Ces recherches ont montré que nous avons tendance à attribuer de manière erronée ce que nous savons des adultes – le fait que les hommes ont une voix plus grave que les femmes – aux bébés, alors que la hauteur de la voix des enfants n’est pas différenciée avant la puberté », explique le Pr Nicolas Mathevon de l’université Lyon/Saint-Etienne. « Les implications potentielles sur les interactions entre les parents et leurs enfants, et pour le développement de l’identité sexuelle des enfants sont fascinantes, et nous avons pour intention de les étudier plus en profondeur. »